Le G20 met en garde contre le "populisme", avec Trump dans le viseur

Des pasteurs de la région de Las Vegas prient avec le candidat présidentiel républicain Donald Trump à Las Vegas, le 5 octobre 2016.

Le gotha économique mondial a mis en garde vendredi contre la montée du "populisme anti-mondialisation" dans une référence à peine voilée aux thèses protectionnistes défendues par le candidat républicain à la Maison Blanche Donald Trump.

"La tendance à un profond populisme anti-mondialisation a incité des politiciens à utiliser un certain discours dans leur campagne afin de tenter d'obtenir des voix", a affirmé à Washington le ministre chinois des Finances, Lou Jiwei, lors d'une conférence de presse du G20 Finances, présidé cette année par son pays.

Sans nommer directement M. Trump, le ministre chinois a assuré que ce climat renforçait "l'incertitude" qui plombe une croissance économique mondiale déjà en berne.

"L'incertitude et les risques auxquels l'économie mondiale font face ont augmenté au moment où plusieurs grandes économies entrent dans une période d'élections générales et alors que les conséquences du Brexit restent incertaines", a ajouté M. Lou à l'issue d'une réunion avec ses homologues des principaux pays développés et émergents.

A un mois de l'élection présidentielle américaine, le candidat républicain continue de séduire les foules en dénonçant les ravages supposés du libre-échange et en promettant une guerre commerciale avec le Mexique et la Chine.

Jamais nommé mais toujours présent: l'ombre de M. Trump a sans cesse plané sur l'assemblée générale du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, qui se tenait cette semaine à Washington.

Son élection marquerait "un changement radical dans la position traditionnelle des Etats-Unis notamment sur la politique commerciale", avait reconnu mardi le chef économiste du FMI Maurice Obstfeld, dans un des commentaires les plus explicites sur le magnat de l'immobilier.

Une présidence Trump n'est toutefois pas le seul motif d'inquiétude pour l'économie mondiale.

De l'autre côté de l'Atlantique, les modalités du divorce entre l'Union européenne et la Grande-Bretagne font encore craindre un recul de l'intégration européenne et continuent de faire trembler les marchés, inquiets d'un scénario d'un "Brexit dur" synonyme d'isolationnisme économique.

Ces craintes ont d'ailleurs provoqué un "krach éclair" vendredi sur les places asiatiques où la livre britannique a perdu plus de 6% contre le dollar.

Réunie cette semaine dans la capitale américaine, les grands argentiers du globe ont par ailleurs exprimé la crainte que la tentation du populisme et du repli sur soi ne s'expriment également dans les élections générales à venir en 2017, en France et en Allemagne.

- Déstabilisés -

"Nous devons reconnaître certains risques politiques liés aux élections présidentielles dans plusieurs pays et dans de grandes économies", a assuré M. Lou.

Dans un message vidéo diffusé vendredi, le président américain Barack Obama est intervenu dans le débat en appelant les représentants des 189 Etats membres du FMI et de la Banque mondiale à "repousser le protectionnisme".

Déstabilisés par cette vague populiste, les dirigeants économiques du globe ont en parallèle dû faire amende honorable cette semaine, en reconnaissant les failles de la mondialisation et en appelant à une croissance mieux partagée.

"La croissance (économique) n'est pas équitable, la distribution des revenus n'est pas équitable. C'est cela qui explique cet attrait sentimental pour la démondialisation", a relevé jeudi le vice-gouverneur de la banque centrale chinoise, Yi Gang.

La mondialisation "doit être légèrement différente" et "ne peut pas se résumer à la promotion du commerce international telle qu'on l'a vu dans l'histoire", a estimé la patronne du FMI Christine Lagarde, appelant notamment à se pencher davantage sur ceux "qui risquent d'être laissés sur le bord du chemin".

Rééquilibrer et relancer la croissance en même temps: le défi n'est toutefois pas mince à l'heure où les politiques monétaires ultra-accommodantes des grandes banques centrales semblent avoir atteint leur limite et où la plupart des Etats riches se serrent la ceinture budgétaire.

A Washington, ces débats ont en tout cas éclipsé les craintes sur la flambée de la dette privée chinoise et sur le sort de la Deutsche Bank, menacée d'une lourde amende aux Etats-Unis et dont la fragilité financière inquiète les marchés.

Avec AFP