Le glyphosate en débat au Bénin

Du coton brut non transformé à Bakou, dans le district de Wewe, au Bénin, le 9 janvier 2018.

Le procès qui a condamné la firme Monsanto aux Etats Unis fait écho au Bénin. La société civile et les organisations pour la préservation de l'environnement disent non à l'utilisation dans les champs du désherbant à base de glyphosate.

La polémique sur la toxicité et la cancérogénicité du glyphosate continue à Cotonou. Pourtant, le ministre de l'Agriculture, Gaston Dossouhoui, est monté au créneau pour calmer la frayeur qui s'est emparée du monde agricole.

Pour lui, "le produit n'attaque que l'herbe, tout est affaire de dose".

"En terme de dangerosité, la classification du produit selon l'OMS et selon les formulations nous apaise déjà par rapport à tout ce qu'on dit sur le produit", rappelle-t-il.

Beaucoup ne sont pas de cet avis. Jean-Michel Kanté, pisciculteur de formation, se pose des questions sur VOA Afrique "si le produit n'était pas dangereux, pourquoi demander de détruire l'emballage après utilisation?"

"Chaque année, dans la partie septentrionale de notre pays, la presse relaie que papa, maman, et enfants sont morts pour avoir consommé sans le savoir des vivres ayant été arrosées par ces pesticides", raconte-t-il. "Il n'y a pas de coins ici au Bénin où vous irez sans trouver les emballages du glyphosate."

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Cette année, le ministère de l'Agriculture a réceptionné 50.000 litres de glyphosate sur 100.000 attendus au profit de la campagne agricole 2018- 2019.

Pour Michel Boko, expert en sciences de l'environnement, il faut être aveugle pour ne pas voir les dangers du produit, expliquant qu'après avoir analysé des eaux de poisson, il a trouvé que "l'eau contenait des résidus de pesticides".

"Tous les pesticides sont dangereux, à des degrés divers", rappelle-t-il.

"Chaque année dans la région cotonnière du Bénin, il y a ce qu'on appelle l'épidémie de woppi, diarrhée, vomissements."

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Dans les champs de coton et milieux ruraux, impossible de soutirer le moindre mot. La peur de manquer de pesticides oblige à opter pour la loi du silence. La société civile appelle le gouvernement à prendre ses responsabilités au risque d'être complice des dégâts que l'utilisation du glyphosate entraîne depuis bien longtemps.

"Est-ce que le gain du coton est plus important que la vie des populations ? Est-ce que le gain du coton est plus important que les conséquences liées à la déforestation?", questionne-t-il.

"Nous ne pouvons que tirer la sonnette d'alarme et dire qu'il faut absolument qu'on arrête immédiatement l'utilisation de ces produits dans l'agriculture."

En attendant, une campagne dénommée "Stop glyphosate" a été lancée par Brice Sohou, spécialiste des risques et catastrophes. La campagne a pour objectif de forcer la main au gouvernement à opter pour un autre désherbant moins dangereux.