Le Nigérian Akinwumi Adesina a surmonté la tempête des accusations de mauvaise gestion portées contre lui et a été réélu jeudi pour cinq ans président de la Banque africaine de développement (BAD), qui aura fort à faire face aux effets de la pandémie sur le continent.
Avec "100% des votes de tous les membres régionaux et non régionaux de la Banque" selon le communiqué de la BAD, M. Adesina, 60 ans, unique candidat à sa succession, a donc reçu un plébiscite masquant quelque peu le séisme qui a failli le renverser.
"En tant que président nouvellement réélu, le Dr Adesina, ancien ministre nigérian de l'Agriculture, débutera son nouveau mandat (de 5 ans) le 1er septembre 2020", selon le texte.
"Je suis ravi que le Conseil des gouverneurs ait réélu M. Adesina (...) En tant qu'actionnaires, nous soutenons fermement la Banque et apporterons à M. Adesina tout le soutien nécessaire pour poursuivre et mettre en œuvre sa vision convaincante pour la Banque au cours des cinq prochaines années", a déclaré la présidente du Conseil des gouverneurs de la Banque, Niale Kaba, ministre ivoirienne du Plan et du Développement.
Lire aussi : Accusé de mauvaise gestion à la BAD, le Nigérian Akinwumi Adesina clame son innocenceIl y a quelques mois, il était au bord du gouffre. Dans un rapport détaillé, des lanceurs d'alerte l'accusaient alors de favoritisme dans des nominations de hauts responsables, en particulier de compatriotes nigérians. Ils lui reprochaient aussi la nomination ou la promotion de personnes soupçonnées ou reconnues coupables de corruption, ou d'avoir accordé des indemnités de départ démesurées à certains cadres.
Fin juillet, Akinwumi Adesina a été disculpé d'accusations de mauvaise gestion par un comité d'experts, à l'issue d'un feuilleton médiatico-financier qui a duré trois mois et déstabilisé l'institution.
Si elles n'ont pas empêché sa réélection, les accusations et le feuilleton ont cependant terni l'image du flamboyant président, qui avait assuré une augmentation de capital géante de 115 milliards de dollars en octobre 2019, selon les observateurs.
"BAD forte et stable"
La gestion du personnel menée par M. Adesina a causé des remous depuis cinq ans, entrainant le départ de nombreux cadres. D'autres craignent désormais "une chasse aux sorcières".
M. Adesina devra donc restaurer la confiance en son action à la fois et interne et en externe, un certain nombre de bailleurs de fonds dont les Etats-Unis n'ayant pas apprécié les accusations.
Pendant les deux journées d'assemblée générale, cet excellent orateur toujours tiré à quatre épingles s'est donc focalisé sur son bilan, assurant les gouverneurs de son "humilité".
"18 millions de personnes supplémentaires ont désormais accès à l'électricité. 141 millions ont bénéficié de technologies agricoles plus avancées favorisant la sécurité alimentaire. 15 millions ont eu accès à un financement. 101 millions ont désormais accès à des transports améliorés. Et 30 millions ont reçu un accès à l'eau et à l'assainissement", a assuré mercredi M. Adesina, faisant le bilan de son premier mandat.
Il est aussi revenu sur la pandémie de Covid-19, alors que la BAD a mis en place en avril un fonds de 10 milliards de dollars pour aider les pays africains à y faire face.
"A cause de la pandémie, l'Afrique a perdu plus d'une décennie des gains réalisés en matière de croissance économique. La reprise sera longue et difficile pour l'Afrique", a-t-il prévenu.
"L'Afrique a besoin d'une BAD forte et stable pour la soutenir tout au long de cette pandémie et pour permettre à ses économies de rebondir afin d'offrir à ses populations une vie et des moyens de subsistance meilleurs et plus sains", a-t-il estimé.
Le Fonds monétaire international (FMI) avait évoqué fin juin une récession de 3,2% cette année pour l'Afrique subsaharienne, et une baisse des revenus des habitants à leurs niveaux de 2010.
La BAD, une des cinq principales banques multilatérales de développement au monde, a été créée en 1964. Elle compte 80 pays actionnaires (54 pays africains et 26 non africains, d'Europe, d'Amérique et d'Asie). Elle est la seule institution africaine cotée triple A par les agences de notation financière.
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