Le régime syrien pousse à Alep-Est, devenue "l'enfer sur Terre"

Un quartier tenu par les rebelles à Alep, Syrie, après des frappes aériennes, le 1er octobre 2016.

Les forces du régime syrien poursuivent leur progression vers les quartiers rebelles d'Alep, qui sont devenus "l'enfer sur Terre" selon un haut responsable de l'ONU.

Les quelque 250.000 habitants de la partie assiégée de la deuxième ville syrienne sont confrontés à "un niveau de sauvagerie qu'aucun humain ne devrait avoir à supporter", a dénoncé le chef des opérations humanitaires de l'ONU Stephen O'Brien. Il a appelé dimanche à "une action urgente pour mettre fin à l'enfer sur Terre".

"Le temps presse. Arrêtez le carnage maintenant", a-t-il imploré.

Face à cette "tragédie humaine", la Commission européenne a annoncé une "initiative humanitaire d'urgence" pour permettre aux organisations humanitaires d'aider la population et notamment "assurer les évacuations médicales des blessés et des malades d'Alep-Est."

Mais, dix jours après le lancement par le régime et son allié russe d'une vaste offensive sur Alep-Est, l'étau se resserre autour de cette partie de la ville contrôlée par les rebelles.

De violents affrontements ont ainsi lieu à Souleimane al-Halabi, sur la ligne de démarcation, a indiqué dimanche l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Aidées par "des dizaines de raids russes", les forces gouvernementales poussaient aussi depuis le nord, vers les quartiers de Boustane al-Bacha et Sakhour et sont parvenues aux abords du quartier d'Al-Helouk.

"Si elles les prennent, les forces rebelles seront confinées dans une petite partie dans le sud-ouest de la ville d'Alep", a indiqué Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH.

L'armée syrienne a promis dimanche que "les armées syrienne et russe garantiraient un passage sûr et une aide" à tout combattant de l'opposition qui ferait défection, selon l'agence de presse officielle Sana.

Ce n'est pas la première fois que Damas fait une telle offre mais militants et rebelles disent craindre de se faire détenir ou torturer s'ils quittent les zones rebelles.

Au nord de la ville d'Alep, des groupes rebelles soutenus par la Turquie progressaient dimanche face aux djihadistes du groupe Etat islamique (EI) et s'approchaient de la localité de Dabiq contrôlée par l'EI, selon l'Observatoire.

'Bain de sang'

Pour la deuxième fois en une semaine, le plus grand hôpital des quartiers rebelles d'Alep a été frappé samedi par deux barils d'explosifs, selon la Syrian American Medical Society (SAMS), dont l'un des responsables, Adham Sahloul, a évoqué des "informations sur l'utilisation d'une bombe à fragmentation".

"Le système de santé dans l'est d'Alep a été presque réduit à néant", a déploré M. O'Brien.

Le coordonnateur des secours d'urgence de l'ONU a appelé les belligérants à permettre au moins l'évacuation des centaines de civils nécessitant des soins urgents.

Médecins sans frontières (MSF) a également appelé Damas et Moscou à mettre un terme "au bain de sang".

"En Syrie, les attaques contre les centres médicaux accueillant des civils et contre les ambulances sont systématiques", a dénoncé la présidente de MSF, Meinei Nicolai.

Depuis le début de l'offensive sur Alep-Est, les bombardements du régime et de la Russie ont tué au moins 220 personnes selon l'OSDH.

Egalement dimanche, 13 raids russes sur une base utilisée par Jaïch al-Izza dans la province de Hama (centre) ont fait 6 morts dans les rangs de ce groupe rebelle soutenu par les Etats-Unis, indique l'Observatoire.

La Russie et le régime sont accusés par les Occidentaux d'utiliser contre des zones civiles notamment des bombes antibunker, incendiaires et à fragmentation. Moscou a balayé les accusations de "crimes de guerre".

Nouvelle résolution?

Les efforts diplomatiques pour rétablir un cessez-le-feu en Syrie semblent complètement enlisés même si Washington et Moscou n'ont pas coupé les ponts en dépit de leurs profondes divergences.

Les chefs de la diplomatie russe Sergueï Lavrov et John Kerry se sont ainsi de nouveau entretenus samedi au téléphone à deux reprises, a indiqué dimanche le ministère russe des Affaires étrangères.

Aucun détail n'a été donné sur le contenu de ces entretiens si ce n'est que les deux dirigeants avaient "discuté des actions communes possibles pour normaliser la situation à Alep", selon le ministère.

Au cours d'un précédent échange, M. Lavrov avait de nouveau "souligné le caractère inacceptable des tentatives des opposants, pilotées par l'Occident, de traiter avec indulgence Al-Nosra et leur blocage des négociations sur un règlement politique de la crise" - allusion au Front Fateh al-Cham, ex-Front al-Nosra qui a renoncé à son rattachement à Al-Qaïda.

A l'ONU, Paris espère présenter lundi aux 15 pays membres du Conseil de sécurité un projet de résolution qui appelle au rétablissement du cessez-le-feu, initié en septembre par un accord américano-russe et qui n'avait duré qu'une semaine.

Avec AFP