Depuis le 22 décembre, une partie du gouvernement fédéral est paralysée par un bras de fer entre les démocrates au Congrès et la Maison Blanche sur le financement d'un mur anti-immigration à la frontière avec le Mexique.
Le président Donald Trump réclame 5,7 milliards de dollars pour construire le mur, sa principale promesse de campagne qui doit endiguer selon lui le trafic de drogue et l'entrée de clandestins.
L'opposition refuse catégoriquement, jugeant ce projet "immoral", coûteux et inefficace, et demande la réouverture des administrations comme préalable à des discussions sur la sécurité des frontières et sur l'immigration.
La proposition républicaine, qui assure un financement du gouvernement jusqu'en septembre, inclut l'enveloppe pour le mur ainsi qu'une concession accordée samedi par M. Trump: un sursis de trois ans pour un million d'immigrants directement menacés d'expulsion.
Le texte démocrate n'évoque pas le budget pour le mur et propose la réouverture des administrations jusqu'au 8 février, pour relancer le débat sur la sécurité aux frontières.
Pour être approuvé, un texte doit obtenir 60 voix au Sénat où les républicains détiennent 53 des 100 sièges. Et il faut aussi qu'il franchisse la Chambre des représentants, désormais aux mains des démocrates.
Selon un responsable républicain, le texte démocrate a peu de chances de passer et, si jamais il l'était, le président y opposerait son veto. Et il apparait peu probable que les sénateurs républicains puissent convaincre des démocrates de s'associer à leur proposition.
M. Trump a réitéré mardi sur Twitter sa volonté de faire construire le mur au nom de la "sécurité nationale". "Ne cédons pas", a-t-il dit à l'adresse des républicains, accusant l'opposition de "jouer à des jeux politiques".
La chef de la majorité démocrate à la Chambre des représentants Nancy Pelosi a répliqué en accusant le milliardaire et les républicains au Sénat de "prendre les Américains en otage".
- Trois ans de sursis -
Pour faire bouger les lignes, le président républicain a mis samedi dans la balance un sursis de trois ans pour les bénéficiaires d'autorisations de résidence abrogées par son administration: quelque 700.000 jeunes entrés illégalement dans le pays avec leurs parents et environ 300.000 titulaires du statut de protection temporaire (TPS).
Mais les démocrates ont refusé cette "compilation de plusieurs initiatives déjà rejetées par le passé".
Le milliardaire s'est, dans le même temps, aliéné la frange de son électorat opposée à toute idée d'"amnistie" pour les clandestins.
Si le "shutdown" touche directement 0,5% des travailleurs américains, il commence à affecter indirectement le moral de plus de la moitié des consommateurs, selon une enquête de l'université du Michigan.
Il pèse aussi sur l'économie et la croissance, sur fond de ralentissement mondial, préviennent les experts.
Environ 800.000 fonctionnaires fédéraux sont contraints au chômage forcé ou doivent travailler sans être payés avant la fin du blocage. Dans des ministères sensibles comme la Sécurité intérieure, la Justice ou les Transports, les effectifs ont été réduits au minimum.
- Faire pression -
Le syndicat des agents de la police fédérale (FBI) a présenté mardi un recueil de témoignages d'agents signalant leurs difficultés.
Faute de financement, le "Bureau" est ainsi incapable de payer ses informateurs, de financer ses opérations ou même d'acheter du papier pour photocopie.
Si les fonctionnaires concernés devraient tous être rémunérés rétroactivement, plus d'un million de salariés de services privatisés ou de sous-traitants d'établissements publics devront faire une croix sur leur paie.
Des initiatives ont été mises en place pour aider les fonctionnaires dans le besoin: nuits d'hôtels et repas gratuits, collectes de fonds, alors que les banques alimentaires font le plein.
"C'est très stressant", a confié à l'AFP une mère célibataire de 39 ans, gardienne à la prison fédérale de Brooklyn, venue chercher de quoi préparer "deux-trois repas" lors d'une distribution de nourriture à New York.
Ce "shutdown", le plus long de l'histoire du pays, commence aussi à avoir un coût politique. Une majorité d'Américains rendent les républicains et la Maison Blanche responsables de la situation, selon plusieurs sondages.
Avec AFP