Tout se complique également pour d’autres scrutins, comme les législatifs et les élections locales, qui se tiendront concomitamment avec la présidentielle.
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L’opposition va résolument en ordre dispersé à ses élections. La nouvelle alliance Tshisekedi-Kamerhe vient dans tous les cas troubler davantage les calculs des cartels politiques congolais eux-mêmes, mais aussi des tireurs de ficelles.
Avant la rencontre de Genève qui a vu sortir le 11 novembre l'outsider Martin Fayulu comme candidat commun désigné par sept des leaders de l’opposition, beaucoup ne pouvaient imaginer un ticket Tshisekedi-Kamerhe.
Lire aussi : Vital Kamerhe se désiste en faveur de Félix TshisekediTant l’un et l’autre étaient donnés favoris pour être l’ "élu de l’opposition" qui affrontera de face le "dauphin" choisi par le président Joseph Kabila comme candidat du Front commun pour le Congo (FCC), coalition électorale au pouvoir.
Le choix même d’Emmanuel Ramazani Shadary comme candidat du FCC avait déjà déconcerté presque toutes les sphères politiques. L’élu de M. Kabila a en tout cas surpris car inattendu par beaucoup. Il n’était pas parmi les favoris.
Les derniers sondages avant la messe de l’opposition à Genève sous l’égide de la fondation Kofi Annan, donnaient Félix Tshisekedi en tête suivi de Vital Kemerhe.
36% des sondés ont choisi Félix Tshisekedi, président du parti historique d'opposition, suivi de l'ancien président de l'Assemblée nationale passé à l'opposition, Vital Kamerhe, avec 17%, selon un sondage réalisé conjointement le 19 septembre par l'organisation congolaise Bureau d’Études, de Recherches, et de Consulting International (Berci) et le Groupe d’études sur le Congo (GEC) de l'Université de New-York après la publication de la liste définitive des 21 candidats retenus pour la présidentielle.
Cela mettait ainsi ces deux gaillards de l’opposition en position de se voir surnageant, déjà revêtu de l’étoffe du leader leur clan politique. Confortant de la sorte la détermination de l’UDPS (Union pour la démocratie et le progrès social), historiquement aînée de l’opposition avec une apparente assise à travers le territoire national, à ne vouloir négocier avec les autres partis que s’ils acceptaient son candidat, Félix Tshisekedi comme devant mener le ticket de l’opposition.
"Félix Tshisekedi ou rien", clamait-on au sein du parti longtemps conduit par le défunt opposant historique Etienne Tshisekedi, père de Félix Tshisekedi.
La même posture était celle de Vital Kamerhe qui a assumé par le passé de hautes fonctions comme celle du président de l’Assemblée nationale de 2006 à 2009.
Lire aussi : Un début de campagne électorale calme en RDCAvec l’appui de son parti l’Union pour la nation congolaise, M. Kamerhe se comptait parmi les "baleines" de la politique congolaise, terme en vogue en RDC.
Ces postures ne pouvaient guère arranger les autres "baleines", entendez les grands gabarits de l’opposition congolaise, tous ayant fait acte de candidature pour la présidentielle du 23 décembre prochain. Surtout pas ceux dont la Commission électorale nationale indépendante et/ou la Cour constitutionnelle ont invalidé les candidatures.
Jean-Pierre Bemba, leader du Mouvement pour la libération du Congo (MLC), acquitté et libéré en juin dernier par la Cour pénale internationale après près de 10 ans de procès pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, s’est vu recaler pour un autre procès pendant, pour subornation des témoins.
Lire aussi : Les Etats-Unis appellent à des élections "crédibles" en RDCMoïse Katumbi, homme d’affaires et ancien gouverneur de l’ex-province de l’ex-Katanga, transfuge comme Vital Kamerhe du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) au pouvoir, en est autre. En exil car poursuivi, après sa volte-face à l’endroit du pouvoir, entre autres pour spoliation immobilière et usurpation de nationalité, il a été empêché de retourner faire acte de candidature.
Et le troisième, c’est Adolphe Muzito, ancien allié du pouvoir et ancien Premier ministre, disqualifié de la course à la présidentielle pour conflit de candidatures avec son ancien parti, le Parti des lumumbistes unifiés (le Palu).
Avec eux et aux côtés de deux autres candidats restés en course (Martin Fayulu et Freddy Matungulu), Vital Kamerhe et Félix Tshiskedi ont constitué le cartel électoral "Lamuka" ("réveillez-vous" en Lingala et en Swahili) avant de se retirer après l’élection de Fayulu comme candidat commun.
Déjà, le choix inattendu de Martin Fayulu avait bouleversé les calculs même au sein de la coalition "Lamuka".
Selon les récits de tous, M. Katumbi, par exemple, lui qui n’a jamais caché que son choix était Félix Tshisekedi, a avancé une motion pour demander que l’on reprenne l’élection du candidat commun, mais il s’est vu plutôt opposé un non catégorie de son protégé comme de Vital Kamerhe.
Lire aussi : Début de la course à la présidentielle en RDCLes deux favoris s’étaient plutôt neutralisés au premier tour de l’élection en votant pour les deux autres candidats.
Ils se sont rétractés 12 heures plus tard et ont retiré leur signature du document sanctionnant ce vote. Ils ont "été grugés" par les autres, a expliqué Félix Tshisekedi qui pourtant la veille, avait déclaré "n’avoir aucun choix et être contraint de convaincre sa base".
La base sera aussi la raison que les deux "réfractaires" évoqueront pour justifier leur retrait.
Coup de théâtre
Pour beaucoup, Vital Kamerhe et Félix Tshisekedi étaient la cause de leur propre débâcle à Genève car l’un et l’autre avait soigneusement évité de se voter mutuellement, ce qui aurait fait de l’un ou de l’autre le "candidat commun".
Lire aussi : Martin Fayulu, candidat unique de l'opposition à la présidentielleLa conséquence aurait donc été le démariage. Mais contre toute attente, c’est plutôt un rapprochement serré qui a pris place entre les deux. Et en fin de compte, un ticket électoral en sortira grâce au désistement de Vital Kamerhe en faveur de Félix Tshisekedi.
Là encore, un élément qui bouleverse les calculs, aussi bien de ceux de la coalition Lamuka que de ceux du pouvoir.
Ce tableau électoral avec ces trois camps n’a même pas effleuré l’idée de plus d’un analyste politique avant la dernière tournure.