"Ils ont tué ma mère aussi et ils ont pris tout ce qui était dans la maison. Ils ont ligoté ma soeur cadette, l'ont fouettée et l'ont violée. Depuis, elle est handicapée, ses bras ne marchent plus car ils ont serré les liens trop fort. Elle a passé une année à l'hôpital, en traumatologie. Elle saignait à cause du viol", se souvient-il, seize ans plus tard.
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Mardi, Jean-Pierre Bemba a été libéré de la CPI, après avoir été acquitté vendredi en appel, à la surprise générale, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité.
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Entre octobre 2002 et mars 2003, appelés à la rescousse par le président centrafricain Ange-Félix Patassé pour contrecarrer la tentative de coup d'Etat lancée par le général (et futur président) François Bozizé, les miliciens "banyamulenge" de Jean Pierre Bemba se sont livrés, sans retenue et pendant plus d'un mois, à de terribles exactions dans la capitale centrafricaine.
Des exactions restées "impunies", selon Bernadette Sayo, fondatrice de l'Organisation pour la compassion et le développement des familles en détresse (Ocodefad, ONG créée en 2004 en soutien aux victimes des "Banyamulenge").
"La CPI ne vaut rien"
"Dépenser des dizaines et des dizaines de millions de dollars de fonctionnement de cette CPI pour en arriver à ce résultat, alors que ça ne change rien au sort des victimes...", rage-t-elle, en ajoutant : "Nous allons nous adresser au gouvernement pour sortir immédiatement de la CPI. La Centrafrique n'est plus dupe!"
"La CPI ne vaut rien!", abonde Ghislain. Lui craint que cette décision ne favorise l'impunité des chefs de guerre du pays, dont l'Etat ne contrôle qu'une mineure partie du territoire et où les groupes armés se battent pour le contrôle des ressources et de l'influence locale.
"Nous croyons que (la CPI) est en train d'encourager les criminels, les grands criminels tel qu'Ali Darassa (chef du groupe armé Union pour la paix en Centrafrique), Noureddine Adam (chef du groupe armé Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique) et les 'comzones' (commandants de zone, chefs de guerre locaux). Ils tuent, ils pillent, ils violent, ils font tout dans le pays et par la suite on va dire qu'ils ne sont pas coupables!", s'énerve-t-il.
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Dans la mémoire de nombreux habitants de Bangui, l'intervention des combattants du Mouvement de libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba - qui deviendra en 2003 vice-président de la RDC puis sera battu à l'élection présidentielle de 2006 par Joseph Kabila - a laissé des traces indélébiles.
"Quand les Banyamunlenge sont arrivés chez nous, près de la concession de l'école Begoua, ils ont violé ma fille. J'ai commencé à pleurer, et d'autres sont arrivés et m'ont violée. Quand mon mari s'est interposé, ils l'ont tué", raconte d'une voix tremblante Marie (le prénom a été changé) en se grattant compulsivement le bras.
Cela faisait des années qu'elle n'avait plus parlé de son calvaire.
Pas de colère
Aujourd'hui, elle veut oublier, et ne nourrit aucune colère contre la décision de la CPI: pour elle et d'autres victimes rencontrées par l'AFP, Jean-Pierre Bemba n'est pas responsable, puisqu'il n'était pas là au moment des faits.
"C'est la faute du commandant des +Banyamulenge+ à Bangui et non de Bemba. Bemba n'est jamais venu sur le terrain. C'est la personne sur le terrain qui devait surveiller ses éléments", explique Joséphine (le prénom a été changé), une autre femme violée par les combattants du Mouvement de libération du Congo (MLC).
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Nelly (le prénom a été changé), également victime d'un viol, partage cet avis, mais souhaiterait néanmoins être dédommagée : "Si Jean-Pierre Bemba est conscient de ce qui nous est arrivé, il n'a qu'à nous dédommager des viols et des pillages".
Arrêté en 2008, l'ancien chef de guerre a passé la dernière décennie dans le centre de détention de la CPI situé dans le quartier balnéaire de La Haye.
Désormais relâché, il devrait rejoindre son épouse et ses cinq enfants installés en Belgique, selon ses avocats.
Avec AFP