L'envoyée de l'ONU "assez optimiste" sur la possibilité d'un cessez le feu

Stephanie Williams à Tunis, le 12 octobre 2020.

L'envoyée spéciale de l'ONU pour la Libye s'est déclarée "assez optimiste" mercredi sur la possibilité d'un cessez-le-feu durable, après deux jours de négociations en face-à-face à Genève (Suisse) entre les parties en conflit.

Stephanie Williams, représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies et cheffe de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul), a dit baser son sentiment sur l'atmosphère "de sérieux et d'engagement" ayant caractérisé les premières discussions en face-à-face de la commission militaire libyenne conjointe représentant les deux parties en conflit, qui ont commencé lundi au Palais des nations de Genève.

"C'est leur pays et la Libye est pour les Libyens. C'est pour cela que je reste très optimiste sur le fait que les parties ici vont arriver à atteindre un cessez-le-feu plus durable et permanent", a-t-elle ajouté lors d'une conférence de presse.

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Elle a annoncé plusieurs accords concrets, dont "l'ouverture des voies terrestres qui connectent toutes les régions et villes de Libye". Elle a précisé que les deux parties s'étaient mises d'accord pour "mettre sur pied des dispositifs de sécurité conjoints" pour assurer l'ouverture de ces voies.

L'accord porte notamment sur les liaisons entre al-Choueref, Sebha et Mourzouk, de Abou Grein à al-Joufra et la route côtière de Misrata à Syrte et jusqu'à Ajdabiya.

Les deux parties ont aussi demandé aux autorités de l'aviation civile de "prendre toutes les mesures nécessaires pour ouvrir ces liaisons aériennes le plus vite possible".

Ces décisions "vont avoir un impact direct et concret sur la vie des Libyens", a affirmé Mme Williams, à un moment "où les conditions socio-économiques dans le pays se détériorent et, bien sûr, la pandémie de Covid-19 augmente exponentiellement dans le pays".

Les deux parties se sont également mises d'accord pour accroître la production de pétrole, en demandant aux commandants des forces rivales "de travailler directement avec le représentant de la National Oil Corporation (NOC, la compagnie pétrolière publique) pour proposer une restructuration des gardes des installations pétrolières afin d'augmenter la production de pétrole et d'en garantir l'écoulement".

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L'homme fort de l'est de la Libye, Khalifa Haftar, avait accepté mi-septembre de lever, sous conditions, le blocus imposé par ses forces sur les sites pétroliers depuis janvier, pour tenter d'obtenir un partage équitable des recettes pétrolières.

Ce blocage a causé plus de 9,8 milliards de dollars (8,2 milliards d'euros) de pertes de revenus, selon la NOC.

Sur un terrain plus politique, Mme Williams a indiqué que la commission militaire conjointe avait aussi accepté de "mettre fin à la réthorique haineuse" dans les médias et sur les réseaux sociaux, d'oeuvrer à ce que le calme qui caractérise actuellement la ligne de front se poursuive et de soutenir les efforts en cours pour la libération de prisonniers.

Elle a en revanche condamné à plusieurs reprises les "interventions étrangères et les violation flagrantes de l'embargo sur les armes".

Depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi après une révolte populaire en 2011 soutenue par l'Otan, la Libye est en proie à des luttes d'influences et aujourd'hui deux autorités se disputent le pouvoir: le GNA, reconnu par l’ONU, et un pouvoir incarné par Khalifa Haftar, homme fort de l'Est soutenu par une partie du Parlement élu et son président, Aguila Saleh.

Ankara a apporté un soutien militaire au GNA qui a changé le cours du conflit en faveur de ce dernier.

Le maréchal Haftar est soutenu par l'Égypte et les Émirats arabes unis, deux rivaux régionaux de la Turquie, ainsi que par la Russie.

Confirmée lors du sommet international du 19 janvier 2020 à Berlin, la commission militaire conjointe doit définir les conditions d'un cessez-le-feu durable, avec retrait de positions militaires.

C'est l'une des trois voies poursuivies en parallèle par la Manul, avec le volet économique et le volet politique.