Manifestations contre des tueries perpétrées par des éleveurs nomades au Nigeria

Vue de Makurdi, Etat de Benue, NIgeria

Environ un millier de personnes ont envahi mercredi Makurdi, capitale de l'Etat de Benue, dans l'est du Nigeria, pour protester contre des tueries perpétrées par des éleveurs nomades peuls contre des cultivateurs.

"Un millier de jeunes se sont rassemblés ce matin, d'abord en bloquant l'autoroute, puis sur un rond-point de Makurdi en brûlant des pneus", a rapporté à l'AFP Helen Teghtegh, directrice d'une ONG locale, Community Links and Human Empowerment Initiative, qui s'associe au mouvement populaire.

"Nous demandons à la présidence d'agir. Nous avons le sentiment que le président Muhammadu Buhari, qui est lui-même peul, aurait dénoncé ces massacres s'ils avaient été commis dans un Etat du nord", a-t-elle ajouté.

Le président Buhari, un Peul-Haoussa musulman originaire du nord du Nigeria, s'est finalement exprimé dans l'après-midi sur les tueries qui ont eu lieu dans l'Etat de Benue lundi et mardi et qui ont fait plus de 20 morts selon le gouverneur Samuel Ortom, une cinquantaine selon la presse locale.

"Le président Buhari exprime son soutien au gouverneur Samuel Ortom", a rapporté la présidence dans un communiqué, notant "plusieurs morts et blessés" dans des attaques "folles et sans coeur".

"Les services de sécurité adéquats ont déployés pour régler le problème et s'assurer que de pareilles attaques n'aient plus lieu", a ajouté le court texte.

"Les gens ont été massacrés comme des animaux", a regretté le gouverneur Ortom mardi soir devant la presse. "Ce n'est pas acceptable", a-t-il ajouté demandant l'aide d'Abuja pour régler cette crise qui secoue régulièrement cet Etat aux terres fertiles.

Les tueries surviennent habituellement entre décembre et mars, à la fin de la saison des pluies, alors que les éleveurs nomades arrivent en grand nombre pour faire paître leurs milliers de têtes de bétails et que les cultivateurs commencent les grandes récoltes d'igname.

En février 2016, des violences entre les deux communautés avaient fait "des centaines de morts", selon les autorités locales.

Il y a un mois, au moins 30 éleveurs peuls ont été tués par des fermiers chrétiens dans l'Etat d'Adamawa, au nord de Benue, selon la police. Les représentants locaux établissent un bilan s'élevant à plus de 60 victimes, essentiellement des femmes et des enfants.

La ceinture centrale du Nigeria, qui s'étend de l'est à l'ouest du pays, est régulièrement le théâtre d'affrontements sanglants entre agriculteurs chrétiens et éleveurs peuls musulmans. Ces derniers, nomades qui transhument traditionnellement avec leur bétail, ont tendance à se sédentariser par manque de terres disponibles mais n'ont jamais pu s'intégrer dans ces Etats à majorité chrétienne.

Selon le think-tank International Crisis Group (ICG), ces violences ont fait quelque 2.500 morts en 2016 et des dizaines de milliers de personnes ont dû quitter leur foyer.

"Ces tueries sont potentiellement aussi dangereuses que l'insurrection de Boko Haram", le groupe jihadiste qui sème la terreur principalement dans le nord-est du Nigeria depuis 2009, met en garde l'ICG.


Avec AFP