La justice marocaine a décidé de poursuivre 65 migrants, en majorité des Soudanais pour avoir participé à la tentative de passage en force meurtrière vendredi dans l'enclave espagnole de Melilla depuis le Maroc, a-t-on appris lundi auprès de la défense.
Le parquet du tribunal de première instance de la ville marocaine de Nador (nord), limitrophe de Melilla, a inculpé 37 migrants pour "entrée illégale sur le sol marocain", "violence contre agents de la force publique", "attroupement armé" et "refus d'obtempérer", a déclaré à l'AFP leur avocat, Khalid Ameza.
Un deuxième groupe, composé de 28 migrants, sera jugé en outre pour "participation à une bande criminelle en vue d'organiser et faciliter l'immigration clandestine à l'étranger", a ajouté Me Ameza.
L'avocat a précisé que la majorité des accusés étaient originaires du Darfour, dans l'ouest du Soudan, en proie à une grave crise alimentaire et où de récentes violences ont fait plus de 125 morts et provoqué le déplacement de 50.000 personnes.
D'autres sont Tchadiens et Maliens, un est Yéménite.
La défense a demandé la liberté conditionnelle pour l'ensemble des inculpés mais le parquet a rejeté cette requête "compte tenu de la gravité des faits qui leur sont reprochés", a expliqué l'avocat.
Ils faisaient partie des près de 2.000 migrants qui ont tenté de pénétrer par la force vendredi matin dans la cité autonome espagnole de Melilla, située en territoire marocain.
Au moins 23 migrants en situation irrégulière ont péri et 140 policiers ont été blessés, selon les autorités locales marocaines. L'Association marocaine des droits de l'Homme (AMDH) a fait état de 27 clandestins décédés.
C'est le bilan le plus meurtrier jamais enregistré lors des nombreuses tentatives de migrants subsahariens de pénétrer à Melilla et dans l'enclave espagnole voisine de Ceuta, qui constituent les seules frontières terrestres de l'UE avec le continent africain.
Au lendemain du drame, une cinquantaine d'organisations de défense des migrants, dont l'AMDH et l'ONG espagnole Caminando Fronteras, ont exigé l'ouverture d'une enquête "immédiate".
Le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), un organisme officiel marocain, a annoncé, lundi la création d'une "mission d'information" sur les "événements tragiques et violents" provoqués par la tentative d'assaut contre la clôture séparant la ville de Nador de l'enclave de Melilla.
Les autorités marocaines assurent que les migrants décédés ont trouvé la mort "dans des bousculades et en chutant de la clôture de fer" lors d'"un assaut marqué par l'usage de méthodes très violentes de la part des migrants".
Le chef de la Commission de l'Union africaine (UA), le Tchadien Moussa Faki Mahamat, a dénoncé dimanche soir "le traitement violent et dégradant de migrants africains". Une réunion à huis clos du Conseil de sécurité de l'ONU est prévue mercredi sur ce drame.
Des ambassadeurs africains accrédités au Maroc avaient été reçus dimanche par des responsables des ministères des Affaires étrangères et de l'Intérieur à Rabat.