La police marocaine lance une application mobile pour traquer les déplacements

Un policier fait renifler des bagages par un chien à Marrakech, au Maroc, 6 mai 2015

La police marocaine utilise depuis quelques jours une application mobile pour suivre ceux qui ne respectent pas les restrictions de déplacement imposées dans le cadre de la lutte contre le nouveau coronavirus, a constaté l'AFP dans différents points de la capitale Rabat.

Le lancement de cette application, mise au point par des ingénieurs de la direction de la Sureté nationale (DGSN), a été officiellement confirmé dans la nuit de mardi à mercredi par une dépêche de l'agence officielle MAP.

Le but est de permettre à la police "de s'informer sur les barrages de contrôle par lesquels le citoyen est passé, facilitant ainsi le processus de suivi de ses mouvements", précise le texte qui cite différents responsables de la DGSN.

Cette application, dans laquelle les policiers enregistrent les numéros de carte d'identité des personnes circulant, ne permet pas aux agents "d'accéder aux informations personnelles du citoyen" et le stockage des informations "se conforme aux critères rigoureux de sécurité, adoptés par la DGSN dans ses bases de données", selon la MAP.

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Plus de 53.000 personnes ont été interpellées depuis l'instauration de l'état d'urgence sanitaire, le 20 mars dernier, selon le dernier bilan officiel. Les interpellations sont suivies de garde à vue dans environ la moitié des cas, puis se traduisent par des condamnations en justice dont le prononcé n'est pas connu.

Le non-respect des restrictions de déplacement est passible d'un à trois mois de prison et/ou d'une amende équivalent à 115 euros.

La Commission nationale de la protection des données (CNDP) a indiqué sur son site internet avoir "pris connaissance, par voie de presse, de la volonté du gouvernement de mettre en place une application de +contact tracing+" ("traçage", NDLR).

"Cette annonce a immédiatement généré une interrogation voire une inquiétude citoyenne autour des risques de déploiement d'un Etat de surveillance dans le cas où les usages permis par cette application n'étaient pas respectueux des droits humains et encadrés juridiquement", a souligné la CNDP en appelant les autorités à la "transparence" tout en louant leur "démarche pro-active" face à la pandémie.

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La presse locale, dont le site d'information Yabilabi, a publié par le passé quelques articles sur l'appétit des autorités marocaines pour "les gadgets technologiques en matière de surveillance des citoyens" en citant différentes données rendues publiques à la suite de piratages informatiques.

L'ONG Amnesty international s'était inquiétée des méthodes de surveillance illégales visant des défenseurs marocains des droits humains, en pointant notamment l'utilisation du puissant logiciel espion du groupe israélien NSO Group dans un rapport publié en octobre dernier.