Merkel au Caire et à Tunis pour parler Libye et migrants

La chancelière Angela Merkel, à gauche, avec le président malien Ibrahim Boubacar Keita, lors d'une conférence de presse à Bamako, Mali, le 9 octobre 2016.

Stabiliser la Libye et endiguer l'afflux de migrants par la Méditerranée, ces deux thèmes profondément liés et cruciaux pour l'UE doivent dominer la visite de la chancelière allemande Angela Merkel jeudi au Caire et vendredi à Tunis.

"La chancelière parlera avec (le président Abdel Fattah) Al-Sissi, parmi d'autres choses de notre coopération économique, des opportunités pour les compagnies allemandes en Egypte mais aussi de comment l'économie allemande peut aider à créer des emplois et des possibilités de formations pour les jeunes Egyptiens", a dit son porte-parole Steffen Seibert sur Twitter.

L'Egypte, comme la Tunisie, est en quête d'assistance et d'investissements pour relancer son économie minée par le chômage.

"Le thème de la migration jouera un grand rôle (...) principalement (au sujet de la) sûreté des côtes et des frontières pour combattre les passeurs. Et l'Allemagne veut travailler avec l'Egypte sur ça", a également ajouté M. Seibert.

Et la Libye, située entre ces deux pays, plongée dans le chaos depuis 2011 et tête de pont pour les migrants tentant de rejoindre l'Europe, sera au coeur des discussions de la chancelière avec M. Sissi et avec le président tunisien Béji Caïd Essebsi.

"Sans stabilisation politique de la Libye, nous ne pourrons pas faire cesser les activités des passeurs et trafiquants (d'êtres humains) qui travaillent depuis la Libye" vers l'Italie, a indiqué Mme Merkel samedi.

"L'Egypte, en tant qu'institution régionale et puissance régionale, joue ici un grand rôle, tout comme l'Algérie et la Tunisie", a-t-elle ajouté.

La fermeture des routes migratoires en Afrique vers la Libye, dont les frontières échappent à tout contrôle, devrait en particulier être étudiée.

Mme Merkel, qui a porté ce message à l'automne au Mali et au Niger, avait prévu d'en faire autant en février à Alger, avant l'annulation de sa visite en raison de l'état de santé du président Abdelaziz Bouteflika.

Car avec la fermeture de la "route migratoire des Balkans" début 2016, la Libye est redevenue, malgré les dangers de la traversée, le point de départ numéro 1 pour ceux qui désirent rejoindre l'Europe.

Des camps pour migrants ?

Selon les chiffres du gouvernement italien, quelque 13.400 arrivées ont été recensées en janvier et février, soit une hausse de 50 à 70% par rapport aux deux premiers mois de 2015 et 2016.

Mme Merkel, sous pression chez elle et en Europe pour avoir ouvert son pays à plus d'un million de demandeurs d'asile, a depuis début 2016 pris la tête des efforts européens pour réduire l'afflux, prônant notamment des accords de renvoi de migrants vers leur pays de transit, comme c'est le cas avec la Turquie.

La thématique est d'autant plus importante qu'elle risque de dominer la campagne des élections législatives du 24 septembre en Allemagne, lors desquelles Mme Merkel vise un quatrième mandat.

Pour autant, la question controversée de l'installation de camps en Afrique du Nord pour y retenir les migrants ne devrait pas figurer, du moins publiquement, à l'agenda des discussions au Caire et à Tunis.

En revanche, Tunis et Berlin ont affiché leur volonté de tourner la page des tensions sur la question des expulsions d'Allemagne de sans-papiers tunisiens, alors que le gouvernement tunisien a été accusé de freiner artificiellement ces retours.

Selon une source officielle tunisienne s'exprimant sous couvert d'anonymat, la visite de la chancelière est l'occasion de "se focaliser sur les dossiers d'investissements", la relance de l'économie étant une condition clé pour pérenniser la stabilité de la Tunisie.

En Egypte, la question des droits de l'Homme et les obstacles au travail des fondations allemandes engagées dans le développement de la société civile doivent aussi être abordés.

Evoquant dans un communiqué la visite de Mme Merkel au Caire, Human Rights Watch (HRW) a ainsi estimé que l'Egypte traversait "une crise des droits humains".

"Les autorités ont effectivement interdit les manifestations, emprisonné des dizaines de milliers de personnes - souvent au terme de procès iniques - et interdit le plus grand groupe d'opposition du pays, les Frères musulmans,", selon l'organisation internationale basée à New York.

A Tunis, dans un discours devant le Parlement, Mme Merkel compte évoquer les progrès en la matière de la Tunisie, tout en soulignant que ces avancées "doivent se muer en exercice vivant de la démocratie".

Avec AFP