Le ferry, qui faisait la navette entre la Casamance (sud de Sénégal) et la capitale, Dakar, avait chaviré lors d'une tempête dans la nuit du 26 septembre 2002 au large de la Gambie.
Ce jour-là, le navire transportait officiellement 1.928 personnes, alors que la capacité d'embarquement était limitée à 536 passagers.
Avarie des moteurs, mauvais temps ou surcharge... les causes précises de la catastrophe n'ont jamais été officiellement élucidées.
Le bilan est également incertain: 1.863 morts et disparus, selon les chiffres officiels; plus de 2.000 morts, selon les associations de familles de victimes. Seules 64 personnes avaient survécu.
Quinze ans plus tard jour pour jour, quelques dizaines de personnes, musulmans et chrétiens confondus, se sont réunies à Mbao, dans la grande banlieue de Dakar, où sont inhumées dans une forêt classée 139 victimes, ont rapporté des journalistes de l'AFP.
Sous une chaleur rendue humide par les pluies récentes, elles se sont recueillies devant un alignement de tombes blanches, pour la quasi-totalité anonymes, au milieu de chants religieux.
En 2003, la justice sénégalaise avait classé le dossier sans suite en concluant à la seule responsabilité du commandant de bord, disparu dans le naufrage.
Pour le président du Collectif des victimes, Idrissa Diallo, "la justice sénégalaise n'a jamais ouvert d'enquête" sérieuse.
"Nous refusons que la disparition de près de 2.000 personnes tombe dans l'oubli. Les familles des victimes réclament le renflouement du navire pour qu'on sache ce qui s'est passé", a ajouté M. Diallo, en présence de responsables sénégalais, de prêtres chrétiens et de religieux musulmans.
"Ceux que je ne vais pas remercier, ce sont les autorités qui ont mal géré le drame au Sénégal" et en France, où "la justice ne nous a pas aidés" et où "on a du mal à faire émerger les responsabilités", a affirmé le président de l'association représentant les 18 victimes françaises du Joola, Alain Verschatse.
En juin 2016, la cour d'appel de Paris avait confirmé le non-lieu prononcé dans cette affaire, mettant fin à une instruction ouverte en 2003 notamment pour "homicides involontaires par violation délibérée des règles de prudence ou de sécurité".
A Ziguinchor, en Casamance, région d'où sont originaires la majorité des victimes, une cérémonie de commémoration distincte a été organisée mardi, en présence de membres du gouvernement, dont le ministre des Forces armées, Augustin Tine. Le ministre de la Culture, Abdou Latif Coulibaly, a annoncé à cette occasion la construction à Ziguinchor d'un mémorial, répondant à l'un des souhaits des associations de victimes.
En Guinée-Bissau voisine, d'où étaient originaires 107 victimes, des familles s'estiment livrées à elles-mêmes depuis le drame.
"Certaines familles se sont résignées maintenant, d'autres non, car elles n'ont jamais vu les cadavres de leurs fils ou filles disparus", a déclaré à l'AFP Teresa Banjaque, une commerçante à Bissau, qui dit avoir perdu cinq collègues dans le naufrage. L'association des parents des victimes formée au Sénégal après le naufrage n'a pas pris en compte celles originaires de Guinée-Bissau et les autorités de ce pays n'ont fait aucun geste dans ce sens, a-t-elle accusé, les larmes aux yeux.
A l'époque, de nombreux commerçants bissau-guinéens se ravitaillant à Dakar préféraient prendre le bateau à partir de Ziguinchor pour éviter les tracasseries de la route et les "rackets des policiers", a affirmé un commerçant, Mama Seidu Djalo.