Selon les pompiers, les risques de submersion de l'île sont "réels", mais ses habitants grondent et refusent leur évacuation malgré les promesses gouvernementales.
"Nous ne bougerons pas d'ici", martèle Oumarou Hamadou, un habitant de l'île. "Nous vivons de pêche et de riziculture, nous ne survivrons pas ailleurs", lance Amadou Hama, un autre résident.
Samedi, Lawan Magadji, le ministre nigérien chargé de la Gestion des catastrophes, a annoncé un plan d'évacuation de l'île et de ses 4.000 habitants.
"Tentes, vivres (...) nous avons tout prépositionné pour les déplacés sur la terre ferme", a assuré à l'AFP Seydou Zataou Ali, le gouverneur de Niamey, croisé sur l'île. Mais les opérations d'évacuation prévues dimanche n'avaient toujours pas eu lieu lundi.
Pourtant, en quelques jours, des superficies vitales ont déjà été englouties par les eaux qui ne cessent de gonfler, a rapporté un journaliste de l'AFP.
De nombreuses maisons en argile sont totalement gorgées d'eau et menacent de s'effondrer à tout moment.
En 2012, des crues historiques du fleuve Niger, troisième grande fleuve d'Afrique, avaient inondé une partie de l'île, obligeant le autorités à déplacer des centaines de personnes.
"Notre évacuation en 2012 a laissé un goût amer: on était devenus des vrais clochards", raconte Oumarou Hamadou. "Si on nous coupe à nouveau de notre cordon ombilical, c'est la mort assurée", jure Soumana Moussa, autre habitant de l'île.
Début septembre, l'Autorité du bassin du fleuve Niger (ABN, neuf Etats) s'est inquiétée de la montée des eaux, redoutant des inondations dans toute la zone du fleuve pires que celles de 2012.
Ces crues sont favorisées par les fortes pluies qui s'abattent depuis juin sur le Mali et le Niger où elles ont fait 44 morts - dont 17 à Niamey - et plus de 80.000 sinistrés dans tout le pays, selon le dernier bilan officiel. Un paradoxe dans ce pays pauvre majoritairement désertique.
Après des "alertes jaune" et "orange", on n'est "plus qu'à 21 centimètres de l'alerte rouge", a averti le ministre Lawan Magadji.
'On ne dort plus'
Lundi, une équipe de pompiers à bord d'une pirogue traditionnelle, a patrouillé sur le fleuve afin d'évaluer les risques de débordement.
La quasi-totalité du million et demi d'habitants de Niamey vivent sur les rives du fleuve et certains ont même construit leurs maisons dans son lit.
Ces habitants ont pris le risque au sérieux et se préparent à affronter le pire. A Saga, les eaux du fleuve ont envahi depuis quelques heures des rues et des habitations inondées sont désertés par les occupants.
"C'est une digue qui a cédé et l'eau s'est répandue partout", se lamente, Ibrahim Dijbo, un habitant de Saga. La rupture de cette digue en 2012 avait transformé "notre vie en enfer", se souvient Mamata, une ménagère du quartier.
"On ne dort plus. La moindre goutte d'eau peut provoquer la catastrophe", redoute Ibrahim Djibo.
Des résidents nantis protègent leurs habitations avec de sacs de sable et des digues d'argile. Les plus résignés ont les yeux vers une autre digue de fortune, qui leur sert de rempart contre les flots.
Des dizaines d'ouvriers s'activent à la renforcer. Pour ne pas être surpris par une montée soudaine des eaux, des habitants ont constitué des "brigades" pour "veiller" sur les rivages.
"Enfants et adultes se relaient pour guetter les eaux", explique Moussa Alfari. "Si l'heure de décamper sonne, alors on saura!", glisse, Ada, le frère d'Alfari, en soufflant sur des braises pour préparer du thé qui permettra de rester éveillé.
Avec AFP