Tard jeudi, dans un communiqué lu à la télévision, les putschistes ont dénoncé "les accords de coopération dans le domaine de la sécurité et de la défense avec la France", dont un contingent militaire de 1.500 soldats est déployé au Niger pour la lutte antiterroriste dans ce pays miné par les violences jihadistes.
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Dans la nuit de jeudi à vendredi, la délégation de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'ouest (Cédéao), venue pour trouver une solution diplomatique à la crise, a quitté Niamey, sans avoir rencontré ni le chef de la junte, le général Abdourahamane Tiani, ni le président déchu Mohamed Bazoum. Cet échec survient à deux jours de la date butoir donnée par l'organisation régionale pour rétablir l'ordre constitutionnel.
La Cédéao, qui a imposé de lourdes sanctions à Niamey, a donné jusqu'à dimanche aux putschistes pour rétablir dans ses fonctions le président Mohamed Bazoum renversé le 26 juillet, sous peine de d'utiliser "la force". Une réunion des chefs d'état-major de la Cédéao doit s'achever vendredi après-midi à Abuja, alors que plusieurs armées ouest-africaines, dont celle du Sénégal, se disent prêtes à envoyer des soldats si une intervention militaire était décidée.
"Riposte immédiate"
Les putschistes ont promis une "riposte immédiate" à "toute agression" de la part d'un pays de la Cédéao.
Le président déchu Mohamed Bazoum s'est de son côté exprimé jeudi soir, dans une tribune publiée par le quotidien américain Washington Post. Il a mis en garde contre les conséquences "dévastatrices" du coup d'Etat pour le monde et le Sahel, qui pourrait passer, selon lui, sous l'"influence" de la Russie par le biais du groupe paramilitaire Wagner. "J'appelle le gouvernement américain et l'ensemble de la communauté internationale à aider à restaurer l'ordre constitutionnel", écrit-il, "à titre d'otage", dans cette déclaration.
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Si les relations sont tendues entre la junte et le bloc ouest-africain, elles le sont aussi de plus en plus avec la France, ancienne puissance coloniale. Outre la dénonciation des accords militaires, l'ambassadeur nigérien à Paris a été limogé par les putschistes, tout comme ceux aux Etats-Unis, au Togo et au Nigeria.
Medias français coupés
Jeudi, les programmes de Radio France Internationale (RFI) et de la chaîne de télévision d'information France 24 ont été interrompus au Niger, "une décision prise hors de tout cadre conventionnel et légal", selon la maison-mère des deux médias, France Médias Monde. Les signaux ont été coupés "sur instructions des nouvelles autorités militaires", a indiqué à l'AFP un haut fonctionnaire nigérien.
La France a condamné "très fermement" cette décision, ainsi que l'Union européenne vendredi matin. RFI et France 24 sont déjà suspendus au Burkina Faso et au Mali voisins, où les militaires nigériens au pouvoir ont envoyé des délégations mercredi.
Des incidents dimanche lors d'une manifestation devant l'ambassade de France à Niamey ont entraîné l'évacuation mardi et mercredi de 577 Français. Selon le chef de la junte, le général Tiani, il n'y a toutefois "aucune raison objective" pour les Français de "quitter" le pays.
Des milliers de manifestants soutenant la junte au pouvoir sont sortis jeudi dans le calme dans les rues de plusieurs villes nigériennes, à l'appel du M62, une coalition d'organisations de la société civile "souverainistes". Nombre d'entre eux scandaient des slogans critiques de la France et brandissaient des drapeaux de la Russie – dont se sont déjà rapprochés le Mali et le Burkina.
Les Etats-Unis, l'un des principaux partenaires du Niger avec la France, ont de leur côté affrété un avion pour évacuer leur personnel non essentiel dans le pays et le président Joe Biden a appelé "à la libération immédiate du président Bazoum". Washington et Paris déploient respectivement au Niger 1.100 et 1.500 militaires pour l'aider dans sa lutte contre les groupes jihadistes liés à Al-Qaïda et à l'Etat islamique.
M. Bazoum, 63 ans, est retenu avec sa famille depuis le jour du putsch dans sa résidence présidentielle.