À Lagos, le gouverneur sortant Babajide Sanwo-Olu, du parti présidentiel APC, a été réélu, a déclaré lundi la Commission électorale (Inec), mettant fin à l'espoir de nombre d'habitants que la capitale économique échappe pour la première fois en deux décennies à l'influence du nouveau président, Bola Tinubu. Un opposant a évoqué des fraudes.
Le pays le plus peuplé d'Afrique, qui compte quelque 215 millions d'habitants, a élu samedi plus de 900 représentants des assemblées des États ainsi que les gouverneurs de 28 des 36 États. Les gouverneurs sont très puissants au Nigeria. Certains d'entre eux disposent pour leur État de budgets plus gros que ceux de plusieurs pays africains.
Your browser doesn’t support HTML5
Ce scrutin s'est déroulé trois semaines après la présidentielle remportée par le candidat du parti au pouvoir, Bola Tinubu, et jugée frauduleuse par les principaux partis d'opposition. Le Parti travailliste (LP) et le Parti démocratique populaire (PDP) affirment que des défaillances techniques ont permis des manipulations en faveur du candidat de l'APC, ce que la Commission électorale réfute.
Le candidat du LP, Peter Obi, avait fait sensation en arrivant en tête à la présidentielle le 25 février à Lagos, considérée pourtant comme le fief du nouveau président. Mais au niveau national, M. Obi a fini troisième, derrière Atiku Abubakar du PDP, deuxième. Les deux candidats malheureux ont contesté les résultats.
Espoir mort-né
L'enjeu samedi était de savoir si la popularité montante de M. Obi, en particulier auprès de la jeunesse, allait se ressentir dans les élections locales. À Lagos, fief du nouveau président, l'espoir du LP est mort-né : M. Sanwo-Olu a remporté une victoire écrasante en obtenant plus de 760.000 votes contre quelque 310.000 pour Gbadebo Rhodes-Vivour, candidat du LP.
À mesure que la Commission égrenait les résultats dimanche, plaçant M. Sanwo-Olu en tête, M. Rhodes-Vivour criait à la fraude sur les réseaux sociaux. "Je suis convaincu sans aucun doute possible que les résultats annoncés par l'Inec ne représentent pas le souhait de la majorité des Lagotiens pacifiques", a-t-il dit sur Twitter.
Your browser doesn’t support HTML5
Pour le moment, l'APC a remporté les élections gouvernorales dans neuf États (Lagos, Ogun, Kwara, Nasawara, Jigawa, Gombe, Yobe, Katsina et Sokoto), tandis que le PDP a gagné à Bauchi, Oyo et Akwa Ibom.
À Kano, poumon économique très convoité du Nord majoritairement musulman, des milliers de partisans du petit parti New Nigeria Peoples Party (NNPP) sont descendus lundi dans la rue pour célébrer la victoire attendue de leur candidat.
Celui-ci est un allié de l'utra-populaire ancien gouverneur Rabiu Kwankwaso, arrivé quatrième à l'élection présidentielle. "C'est une victoire pour Kano, car la volonté du peuple a prévalu malgré les tentatives de subversion", a insisté Hajara Sani, 23 ans, en observant la foule.
Alcool, spaghetti
Les résultats n'ont en revanche pas encore été communiqués dans les régions clés de Rivers (sud) et de l'Adamawa (nord-est) où pourrait être élue la première femme gouverneure dans l'histoire démocratique du Nigeria. Le président sortant Muhammadu Buhari doit quitter le pouvoir en mai après deux mandats et un bilan jugé catastrophique.
Observateur du scrutin, le Centre pour la démocratie et le développement (CDD) a noté dans certaines zones du pays "une tendance au découragement" à la suite de la présidentielle. À nouveau, des électeurs et des partis d'opposition affirment que des incidents techniques ont permis samedi la manipulation de résultats, ce que l'Inec nie.
Malgré des signes de faible participation, les observateurs du centre civique Yiaga Africa ont noté "une amélioration importante dans la gestion de la logistique de l'élection" samedi. Les bureaux de vote ont ouvert à l'heure pour la plupart et les machines d'enregistrement biométriques et le portail en ligne montrant les résultats semblaient fonctionner relativement bien, selon les deux organisations.
Des violences ont néanmoins été signalées samedi dans plusieurs États où des voyous ont tenté d'intimider les électeurs, détruisant parfois le matériel électoral, selon des médias locaux et des observateurs électoraux. Par ailleurs, selon Yiaga Africa, des voix ont été achetées samedi contre 1.000 naira (environ deux euros), de l'alcool, des spaghetti ou du tissu.