Nombre record de candidats pour la présidentielle au Zimbabwe

Le président Emmerson Mnangagwa donne un discours lors du jour d'indépendance du Zimbabwe à Harare, le 18 avril 2018.

L'opposition zimbabwéenne se présente en rangs extrêmement dispersés pour la présidentielle du 30 juillet, la première depuis la chute de Robert Mugabe en novembre. Vingt-trois candidats - un record - sont en lice, du pain bénit pour le président sortant Emmerson Mnangagwa, selon les analystes.

"Le nombre sans précédent de candidats indique une ouverture de l'espace politique et un intérêt des Zimbabwéens pour la politique", après trente-sept ans de régime autoritaire de Robert Mugabe, constate Rushweat Mukundu de l'Institut pour la démocratie au Zimbabwe, basé à Harare.

Les années Mugabe ont été synonymes de répression de l'opposition et d'élections entachées de fraudes et de violences. Le nouveau président Mnangagwa ne cesse lui de répéter que les élections générales du 30 juillet seront "libres, justes et transparentes".

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Pour la première fois, la télévision publique a d'ailleurs couvert en intégralité la présentation du programme électoral du principal parti d'opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC). Récemment, la police a également autorisé le MDC à manifester dans la capitale, Harare, pour exiger des réformes électorales.

Le président Mnangagwa, membre de la Zanu-PF au pouvoir depuis l'indépendance en 1980, "a créé l'impression qu'il se démarquait du passé, d'où le nombre sans précédents de candidats", explique l'analyste politique indépendant Alexander Rusero.

Mais au final, nombre d'entre eux "n'ont pas de soutien au-delà de leur petite clique et des Eglises dont ils font partie", ajoute-t-il.

La présidentielle devrait donc essentiellement se jouer entre deux hommes, selon les experts: le président sortant et le tout nouveau chef du MDC, Nelson Chamisa. Avec toutefois un avantage certain pour le premier.

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"Le bulletin de vote pour la présidentielle sera le plus long de toute l'histoire du Zimbabwe. La multiplication des candidats de l'opposition signifie que le vote de l'opposition sera plus divisé", estime l'analyste Takura Zhangazha basé à Harare.

Le président va également "bénéficier de son poste de sortant. On dit qu'il a fait partie du système qui a permis à Mugabe de se maintenir au pouvoir. Maintenant il a la machine à frauder à sa disposition", avance Alexander Rusero.

'Triche'

Jusqu'à son limogeage en octobre de son poste de vice-président du pays, Emmerson Mnangagwa faisait partie des caciques du régime Mugabe, au point d'être pressenti comme le dauphin du président nonagénaire.

Tombé en disgrâce, il a finalement pris rapidement sa revanche. En l'espace de deux semaines, Robert Mugabe a été lâché par l'armée et la Zanu-PF et a dû lui laisser sa place.

"S'il y a de la triche" à la présidentielle du 30 juillet, "les observateurs auront au moins quelque chose de positif à dire, à savoir que l'espace politique était libre et avait permis à un nombre élevé de candidats de se présenter", avance avec cynisme Alexander Rosero.

Parmi eux figurent l'ancienne vice-présidente Joice Mujuru, l'ex-ministre Nkosana Moyo, le sculpteur et musicien Taurai Mteki, l'ancienne numéro 2 du MDC, Thokozani Khupe et le défenseur des droits de l'Homme, Lovemore Madhuku.

Pour ce dernier, "participer à la présidentielle, c'est apporter une voix différente, alors qu'on est habitués à avoir deux partis dominants qui ne font rien si ce n'est se battre entre eux".

"On a besoin d'entendre une troisième, une quatrième, une cinquième voix. On va avoir un tel impact que (...) d'ici aux prochaines élections dans cinq ans, on détruira les deux principaux partis", le MDC et la Zanu-PF, prédit-il.

De jeunes électeurs veulent toutefois croire au changement dès 2018.

"Je suis né sous le Zanu-PF, explique Takudzwa Mutepeya, un vendeur de rue de 27 ans à Harare. Je n'ai connu que la pauvreté et la souffrance, c'est un vote pour le changement", lance-t-il alors que le pays est plongé depuis plus d'une dizaine d'années dans une très grave crise économique.

Avec AFP