Dévoilé en 2013, ce programme offre une alternative aux banques suisses soupçonnées d'avoir facilité l'évasion fiscale de riches Américains: elles peuvent, pour échapper aux poursuites, payer une pénalité et accepter de livrer des informations détaillées aux autorités.
Basée à Lugano, la BSI est devenue lundi la première à s'engager dans cette voie, a annoncé le ministère américain de la Justice (DoJ) qui mène des négociations en parallèle avec d'autres établissements helvètes.
La banque a ainsi accepté de verser 211 millions de dollars d'amende pour avoir abrité les comptes de contribuables américains "en sachant qu'ils n'étaient pas déclarés aux Etats-Unis", selon le communiqué.
"BSI a non seulement aidé des clients américains à dissimuler leur identité pour les tenir à l'abri de l'Internal Revenue Service (IRS, le fisc américain, ndlr) mais les a également aidés à rapatrier du cash", accuse le ministère.
Aux termes de l'accord conclu avec Washington, BSI devra surtout lever le voile sur ses activités pour faire la preuve de sa bonne volonté.
Dans les quatre prochaines années, elle devra fournir aux Etats-Unis une liste complète de ses activités américaines, dévoiler le nom d'autres banques qui auraient ouvert des comptes "secrets", et fermer les comptes de ses clients qui violeraient les obligations édictées par Washington.
Elle est également tenue de mettre au jour ses stratégies pour "attirer" de riches clients dans ses filets, pointe l'accord consulté par l'AFP.
Et si elle faillit à ces obligations, la banque s'expose à des poursuites judiciaires au risque de se voir infliger des pénalités plus lourdes et des sanctions plus graves, comme un retrait de licence.
"BSI est la première à signer (...) mais ce ne sera pas la dernière", a affirmé Caroline Ciraolo, une des ministres adjointes de la Justice par intérim.
- Coups de boutoir -
Depuis plusieurs années, Washington soupçonne des banques suisses de continuer à favoriser l'évasion fiscale, en dépit de la condamnation d'UBS en 2009 aux Etats-Unis à une amende record de 780 millions de dollars.
Les autorités espèrent aujourd'hui rallier d'autres banques suisses à leur programme afin d'assécher ce mouvement et regarnir les caisses. Selon un rapport sénatorial de 2008 cité par le DoJ, l'évasion fiscale coûterait chaque année la bagatelle de 100 milliards de dollars au Trésor américain.
Ce plan de régularisation, qui n'est pas ouvert aux banques suisses déjà visées par une enquête, n'en est qu'à ses premiers pas mais il a déjà un impact, assure le ministère. Credit Suisse, qui en est exclue, a dû payer en mai 2014 une amende record de 2,6 milliards de dollars pour évasion fiscale.
"Le programme des banques suisses, couplé à nos enquêtes sans relâche, ont changé la manière dont les banques suisses conduisent leurs affaires", affirme un autre ministre adjoint de la Justice, Stuart Delery.
Ironiquement baptisé "Lex Americana" à Genève, ce programme a en tout cas soulevé un intense débat en Suisse dont le secret bancaire tombe peu à peu sous les coups de boutoir des Etats-Unis et de la communauté internationale.
Entrée en vigueur en juillet 2014, la loi américaine dite Fatca oblige les banques étrangères, et notamment suisses, à informer systématiquement l'IRS des comptes et avoirs détenus par les contribuables américains.
Les principales puissances mondiales du G20 veulent par ailleurs étendre ce système en généralisant l'échange automatique de données bancaires, malgré la résistance des milieux d'affaires.
"Avec la généralisation d'internet, il est plus facile que jamais de transférer de l'argent sur le globe. Nous nous assurons que cela ne facilitera pas la tâche des Américains aisés qui veulent éviter de payer leur juste contribution aux impôts", assure Stuart Delery.
Avec l’AFP