Nouveau renvoi du procès de l'ex-président Zuma

L'ancien président sud-africain Jacob Zuma (2e G.) au sortir du tribunal de Durban à Durban, le 8 juin 2018.

La justice sud-africaine a encore renvoyé vendredi le procès de l'ancien président Jacob Zuma, poursuivi pour corruption dans une rocambolesque affaire de ventes d'armes vieille de près de vingt ans, en raison cette fois d'une controverse sur le paiement de ses énormes honoraires d'avocat.

Costume anthracite relevé d'une cravate rouge à pois blancs, M. Zuma, 76 ans, s'est assis pour la deuxième fois dans le box des accusés de la Haute Cour de Durban (nord-est), soutenu depuis l'extérieur par les "vivas Zuma" de centaines de partisans de son fief de la province du KwaZulu-Natal.

Après une demi-heure d'audience, le juge Mjabulinesi Madondo a renvoyé l'affaire au 27 juillet, à la demande de l'accusation et de la défense.

Au coeur de ce nouveau report, une affaire dans l'affaire très politique qui nourrit la polémique depuis plusieurs mois: le paiement des frais d'avocat de l'ex-chef de l'Etat.

Jusque-là pris en charge par le contribuable sud-africain au motif des fonctions officielles de l'ancien président, ces honoraires ont pris des allures de puits sans fond.

Selon le principal parti d'opposition, l'Alliance démocratique (DA), les frais d'avocat remboursés jusqu'à présent par l'Etat à Jacob Zuma, mis en cause pour corruption dans plusieurs procédures judiciaires, se montent à 15,3 millions de rands (plus d'un million d'euros).

Le ministre de la Justice Michael Masutha a encore corsé la note en avril en révélant que le gouvernement avait payé depuis l'arrivée en 2009 de Jacob Zuma à la présidence la coquette somme de 24.240.201,54 rands (1.609.368,673 euros au cours de jeudi) pour sa défense.

'Voleur'

Vent debout, la DA et les Combattants pour la liberté économique (EFF, gauche radicale) ont saisi la Haute Cour de Pretoria pour exiger la fin de la prise en charge publique offerte à celui qu'ils appellent le "voleur", et son remboursement intégral.

En mars, le nouveau président du pays Cyril Ramaphosa s'est invité dans le débat en confirmant le remboursement, en vertu d'un accord passé en 2006 entre M. Zuma et le chef de l'Etat de l'époque, Thabo Mbeki.

Mais le tollé suscité par son intervention a contraint M. Ramaphosa, qui s'est fait le chantre de la lutte contre la corruption, à revoir sa position. Il a suspendu le paiement des honoraires de son prédécesseur, puis promis de se conformer à la décision à venir de la justice.

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Visiblement inquiet de la solvabilité de son célèbre client, l'avocat de toujours de Jacob Zuma, Michael Hulley, a demandé vendredi un renvoi du procès, le temps que la question de ses honoraires soit tranchée. Il a d'ores et déjà prévenu qu'il ne pourrait plus assurer la défense de l'ex-président si ses frais n'étaient plus couverts par l'Etat.

La Haute Cour de Pretoria doit se prononcer sur la question dans les semaines qui viennent.

"Nous espérons que d'ici (le 27 juillet) nous aurons suffisamment de temps pour éclaircir la question de ce financement", a plaidé vendredi M. Hulley.

Les croque-morts

Sans attendre la réponse de la justice, les soutiens de Jacob Zuma ont déjà lancé la riposte, sous la forme d'un fonds public de soutien. Et la très inattendue Association sud-africaine des croque-morts annoncé qu'elle était prête à prendre en charge ses frais de justice.

"L'Etat doit payer pour ses frais de justice parce qu'il n'est plus président, il n'a plus de salaire et il doit subvenir aux besoins d'une grande famille", a jugé Sandra Ndlamlenza, 43 ans, au milieu de la foule venue soutenir "JZ" devant le palais de justice de Durban.

"Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il n'a pas les moyens de payer mais c'est une question de principe", a renchéri un de ses voisins d'indignation, Ntanto Dlomo, 33 ans, "si vous êtes poursuivis quand vous avez un mandat politique, c'est à l'Etat de payer votre défense".

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Dans l'affaire jugée à Durban, M. Zuma est accusé d'avoir touché pour 4.072.499,85 rands - 280.000 euros au cours actuel - de pots-de-vin de la part du groupe français Thales lors d'un contrat d'armement de près de 4 milliards d'euros attribué en 1999.

L'entreprise d'électronique et de défense est également poursuivie.

M. Zuma a toujours nié ces allégations. Vendredi encore, il s'est défendu devant ses partisans d'accusations "politiques". "Il n'y a rien dans le dossier (...). Ils ne devraient pas me provoquer, je pourrais dire moi aussi ce que je sais sur eux", a-t-il lancé, menaçant.

Englué dans les scandales, M. Zuma a été poussé à la démission mi-février après un long bras de fer avec son propre parti, le Congrès national africain (ANC, au pouvoir), et son successeur Cyril Ramaphosa.

Avec AFP