Eliminée mardi en quarts de finale de l'Open d'Australie, celle qui se définit comme "un produit 100% tunisien" peut néanmoins être fière de sa "formidable aventure", saluée par la presse tunisienne, mais aussi par le président tunisien, qui l'a félicitée par téléphone.
Pour Kaïs Saïed, Jabeur est "un exemple pour les femmes et les jeunes", dont "chaque coup de raquette défend le drapeau tunisien".
Le fruit d'un parcours de longue haleine: celle qui, à 25 ans, ambitionne de "gagner un tournoi du Grand Chelem" a commencé le tennis dès ses trois ans dans la petite ville de Hammam Sousse, près de la station balnéaire de Sousse.
Lire aussi : Rafael Nadal rejoint les demies de l'US OpenAprès un passage en club, elle rejoint le centre de promotion du tennis installé au sein de son école, et animé par celui qui deviendra son entraîneur, Nabil Mlika.
Ce dernier se souvient de "son dynamisme et son application". Ons "s'est surtout distinguée par son talent et sa rage de vaincre, souligne auprès de l'AFP celui qui l'a suivie de 4 à 13 ans.
- "Boire un café à Roland-Garros" -
Dès son plus jeune âge, elle affiche clairement ses ambitions. Vers 10 ans, "plusieurs fois elle a dit à sa maman +Un jour je te ferai boire un café à Roland-Garros+", raconte Nabil Mlika. "Je prenais ça comme une plaisanterie -- mais apparemment, elle était si sérieuse. Elle l'a fait. C'est magique".
Lire aussi : L'Australienne Ashleigh Barty perd sa place de N.1 mondiale du tennis fémininSon club n'avait à l'époque aucune installation: les entraînements se déroulaient sur les courts de tennis des hôtels voisins. Aujourd'hui, des bambins se retrouvent l'après-midi sur la dizaine de terrains, et le nom de Ons Jabeur fait briller leurs yeux.
A 12 ans, la jeune prodige rejoint les meilleurs athlètes formés au lycée sportif d'El Menzah à Tunis.
"Ons avait une facilité de gestes techniques exceptionnelle", souligne l'ex-directeur technique de la Fédération, Hichem Riani. "Elle était très vivante, dynamique, sympathique et sociable, elle aimait beaucoup l'humour".
Ses anciens collègues Mehdi Abid, 24 ans et Moez Bougatya, 26 ans, se rappellent d'une enfant qui, ayant toujours dominé les autres filles, aimait s'entraîner avec les garçons.
"Une fois, elle a participé à un tournoi de garçons et a gagné des matches, ce qui a démoralisé certains joueurs, vexés d'être battus par une fille", ajoute en rigolant Mehdi.
En 2011, en pleine révolution tunisienne, Jabeur, 16 ans, se fait connaître en remportant le tournoi juniors de Roland-Garros, son "meilleur souvenir en tennis".
- "Inspirer les jeunes générations"
Six ans plus tard, c'est à nouveau sur la terre battue parisienne qu'elle s'illustre, devenant la première femme d'un pays arabe à se qualifier pour le troisième tour d'un Grand Chelem en dominant la Slovaque Dominika Cibulková, alors 7e mondiale.
Un record désormais battu à l'issue de son parcours australien: avant son quart de finale perdu mardi devant l'Américaine Sofia Kenin (6-4, 6-4), seule une Egyptienne, Betsy Abbas, avait atteint en 1960 les quarts de finale aux Internationaux de France. Mais c'était avant l'ère Open.
La trajectoire d'Ons Jabeur a projeté le tennis en Une des médias tunisiens, un pays où le foot règne en roi.
Si elle a quitté la Tunisie à 16 ans, c'est pourtant là-bas qu'elle est revenue se préparer pour Melbourne, avec l'entraîneur tunisien Issam Jalleli, et son mari et préparateur physique Karim Kamoun, escrimeur, se félicite la présidente de la Fédération tunisienne de tennis Salma Mouelhi.
Ons espère "inspirer les jeunes générations". Des cafés de Tunis se sont mis à rediffuser ses matches en journée, et dans les clubs, elle a déjà réussi son pari.
"Ons représente toute l'Afrique, et personnellement, elle m'inspire beaucoup", lance Elyes Marouani, un joueur de tennis de 17 ans. "Ce qu'elle a réalisé me pousse à travailler plus et m'a appris à ne jamais lâcher".