Attentats: le mystère Abaaoud plane, l'état d'urgence renforcé en vote à l'Assemblée

Abattu par la police française ou en fuite? Le sort d'Abdelhamid Abaaoud, cerveau présumé des attentats de Paris, reste incertain, alors que les députés français doivent examiner jeudi un projet de loi renforçant l'état d'urgence instauré après les tueries.

En France, l'assaut mené mercredi avant l'aube par la police antiterroriste contre un appartement à Saint-Denis, au nord de Paris, visait spécifiquement Abdelhamid Abaaoud, surnommé Abou Omar al-Baljiki ("le Belge" en arabe) au sein de l'EI et soupçonné d'être l'organisateur des plus sanglants attentats de l'histoire française.

Huit personnes ont été arrêtées, mais ni Abdelhamid Abaaoud, ni Salah Abdeslam, autre suspect-clé, n'en font partie, a déclaré le procureur de Paris, François Molins.

Les enquêteurs doivent désormais identifier les corps retrouvés sur place, sévèrement abîmés par des fusillades nourries et des explosions.

M. Molins a évoqué "au moins deux morts" dans l'appartement: un "corps criblé d'impacts", non identifiable visuellement, et une personne qui s'est fait exploser à l'arrivée des policiers - vraisemblablement une femme "mais ce point devra cependant être vérifié", a-t-il précisé.

Le ministère français de l'Intérieur n'a "pas exclu" qu'un "troisième terroriste" ait pu être tué, au vu des morceaux de corps retrouvés.

La possible présence en France d'Abdelhamid Abaaoud, tête d'affiche du contingent des jihadistes francophones de l'EI, inquiète.

Son nom avait été évoqué par les services de renseignement américains dans un rapport en mai, qui mettait en garde contre une possible attaque structurée de l'EI en Europe. Le document émettait l'hypothèse qu'Abaaoud avait tenté de faire croire à sa mort fin 2014 sur le front syrien, afin que les autorités belges relâchent leurs efforts pour l'appréhender.

Selon François Molins, les enquêteurs français avaient recueilli lundi un témoignage "faisant état de la présence d'Abaaoud" en France. Ce témoignage, "qui a fait l'objet de nombreuses vérifications téléphoniques et bancaires", a abouti à l'assaut contre l'appartement de Saint-Denis.

La traque se poursuit également contre Salah Abdeslam, 26 ans, membre présumé du groupe qui a mitraillé vendredi les terrasses de cafés et restaurants parisiens, avec son frère Brahim Abdeslam qui s'est fait exploser. Il est activement recherché, notamment en Belgique où, selon les autorités françaises, les attaques ont été organisées et où il aurait été exfiltré samedi matin depuis Paris. Deux complices présumés de cette fuite, Mohammed Amri (27 ans) et Hamza Attou (20 ans), ont été arrêtés à Bruxelles et inculpés par la justice belge pour "attentat terroriste". Un autre jihadiste, non identifié, serait peut-être aussi en cavale.

Quatre kamikazes ont déjà été identifiés, tous des Français, âgés de 20 à 31 ans. Il reste à mettre un nom sur un cinquième homme passé par la Grèce cet automne, auprès duquel a été retrouvé un passeport syrien à l'authenticité douteuse.

- Etat d'urgence renforcé -

Dans ce contexte pesant, les députés français votent jeudi un projet de loi renforçant l'état d'urgence, décrété par le président François Hollande au moment des attaques.

Le texte devrait recevoir un large assentiment de l'Assemblée, avant d'être soumis vendredi au vote du Sénat en vue d'une adoption définitive. Il prévoit la prolongation de l'état d'urgence pour trois mois à compter du 26 novembre, soit jusqu'à fin février, et élargit le régime des assignations à résidence à toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics. Jusqu'à présent, la loi prévoyait, pendant l'état d'urgence, la possibilité d'assigner à résidence une personne "dont l'activité s'avère dangereuse" pour l'ordre public.

Alors que se multiplient les appels à fermer les mosquées et lieux de prières radicalisés et à expulser les imams étrangers extrémistes, le texte intègre aussi dans l'état d'urgence la dissolution de groupes et associations extrémistes participant à des actes portant une atteinte grave à l'ordre public, les facilitant ou y incitant.

Avec AFP