Présidentielle au Niger : pouvoir et opposition fourbissent leurs armes pour le 2e tour

Quelques personnes rassemblées près d'une mosquée, Niamey, Niger. 9 septembre 2011

Le président sortant Mahamadou Issoufou est largement en tête mais l'opposant Hama Amadou, bien qu'emprisonné, croit en ses chances.

Le pouvoir et l'opposition fourbissaient déjà samedi leurs armes au Niger en vue du 2e tour, au lendemain de l'annonce des résultats de la présidentielle: le sortant Mahamadou Issoufou est largement en tête mais l'opposant Hama Amadou, bien qu'emprisonné, croit en ses chances.

Le deuxième tour le 20 mars sera inédit et atypique avec deux hommes qui étaient alliés en 2011 -- Hama Amadou avait rallié le camp Issoufou à l'issue du premier tour-- mais surtout avec un candidat incarcéré dans le cadre d'une affaire controversée de trafic d'enfants et obligé de faire campagne depuis sa prison de Filingué, à 180 km au nord de Niamey.

Avec 48,41% contre 17,79% à son rival, M. Issoufou, 63 ans qui brigue un second quinquennat, est "en ballotage extrêmement favorable", selon le ministre de l'Intérieur Hassoumi Massaoudou.

"On est un peu déçus de ne pas passer dès le premier tour sur le plan personnel, mais sur le plan politique, le travail est fait", a-t-il dit.

Il n'a manqué au président sortant que 170.000 voix sur 4,83 millions de suffrages exprimés pour passer au premier tour comme il en avait fait le pari.

"Cela démontre que nous sommes une véritable démocratie", a estimé la ministre des Affaires étrangères Aïchatou Kané Boulama. "On n'a pas influencé le vote comme nous en accuse l'opposition et cela va conforter notre image de démocratie au Niger et à l'étranger".

Elle assure que le président "se repose sur son bilan", mettant notamment l'accent sur le vote favorable à M. Issoufou à Diffa (sud-est), la zone victime d'attaques des islamistes nigérians de Boko Haram.

"Cela prouve que les Nigériens plébiscitent la politique du président qui a rétabli la sécurité dans le pays", a-t-elle affirmé.

Tractations pour le prochain gouvernement

Quinze candidats étaient en lice dans ce pays sahélien de 18 millions d'habitants, parmi les plus pauvres de la planète et vivant sous la menace des groupes jihadistes.

Derrière les deux postulants à la victoire finale, l'ancien Premier ministre Seini Oumarou a obtenu 12,11% des suffrages et l'ancien président Mahamane Ousmane 6,25%.

Si on ajoute Amadou Boubacar Cissé (1,48%), les grands opposants qui ont promis de s'unir pour le second tour ne pèsent pas plus de 40%.

Un des arbitres pourrait être la surprise du scrutin, Ibrahim Yacouba (4,34%), exclu du parti du président Issoufou il y a quelques mois mais qui ne fait pas partie de la coalition de l'opposition COPA 2016.

"Il y a très peu de choses à faire pour l'emporter", se félicite Mohamed Bazoum, ministre d'Etat sans portefeuille, un des hommes clés de M. Issoufou.

Il confie avoir déjà commencé à prendre langue avec des candidats malheureux pour des alliances.

Aux élections législatives, qui étaient couplées avec la présidentielle, le parti au pouvoir et ses alliés ont déjà remporté la majorité absolue, selon les résultats officiels, avec plus de 90 députés sur 171 sièges.

"Nous avons remporté la majorité au Parlement, nous serons au gouvernement et nous avons des choses à proposer", a déclaré Mohamed Bazoum.

"De la prison à la présidence"

Hama Amadou, 66 ans, ancien Premier ministre passé à l'opposition, est incarcéré depuis novembre 2015 dans un dossier de "droit commun" selon les autorités.

Mais, celui qu'on surnomme "le Phénix", parce qu'il renaît de ses cendres, est "confiant qu'il va battre Issoufou", promet Nassirou Halidou, député du parti de M. Amadou, qui lui a rendu visite en prison vendredi.

"Il va aller de la prison à la présidence", affirme le député.

"Il y a eu des fraudes massives (...) Les résultats annoncés ne sont pas le reflet de la réalité. En vérité, Issoufou a obtenu 38%, Hama 28%, Seini Oumarou 23% et Mahamane Ousmane 10%", jure-t-il. "Au deuxième tour, on va l'empêcher de voler et on va gagner".

La COPA 2016 estimé samedi dans un communiqué que le scrutin était une victoire du "prisonnier politique Hama Amadou" et demandé sa libération pour qu'il puisse "battre campagne comme son adversaire".

La coalition assure avoir comme "premier objectif de sauver le Niger du chaos" et de battre "Issoufou Mahamadou et son régime gangréné par la corruption".

Elle appelle ses membres à "faire bloc" autour de Hama Amadou "désormais le candidat de la COPA 2016", appelant "les autres forces démocratiques" à se joindre à elle.

AFP