Prison pour le beau-frère du roi d'Espagne

La princesse espagnole Cristina et son mari Inaki Urdangarin à leur arrivée au tribunal des Iles Baléares, à Palma de Majorque, Espagne, le lundi 11 janvier 2016

La justice a relaxé la sœur du roi d'Espagne Cristina de Bourbon et condamné son mari à six ans de prison, dans une des plus retentissantes affaires de corruption de ces dernières années, qui avait ébranlé la monarchie.

Ce jugement peut encore être contesté en appel. Mais le parquet pourrait éventuellement demander l'incarcération immédiate du mari, Inaki Urdangarin, âgé de 49 ans.

Le tribunal des Iles Baléares, à Palma de Majorque, a infligé à l'ancien duc de Palma, M. Urdangarin, une peine de six ans et trois mois de prison, et une amende de plus de 512.000 euros. Il était accusé d'avoir détourné entre 2004 et 2006, avec un associé, plusieurs millions d'euros de subventions attribuées à une fondation à but non lucratif, appelée Noos, qu'il présidait.

Les deux dirigeants de la fondation se voyaient reprocher d'avoir "gonflé" le montant des contrats signés avec les gouvernements régionaux des Baléares et de Valence, alors dirigés par le Parti populaire (PP, droite).

De son côté, Cristina de Bourbon, 51 ans, a été relaxée après avoir été le premier membre de la famille du roi à comparaître devant un tribunal.

En 2016, la soeur du roi avait été poursuivie pour complicité de fraude fiscale en lien avec les malversations de son mari quand il présidait l'institut Noos.

"Nous devons acquitter et nous acquittons Cristina Federica de Bourbon et de Grèce des délits contre l'administration fiscale dont elle était accusée", peut-on lire dans le jugement.

Cristina doit cependant payer une amende de 265.000 euros du fait de sa "responsabilité civile solidaire" en tant qu'épouse de M. Urdangarin, une somme déjà restituée pendant la procédure.

- 'Satisfaction' et 'contrariété' -

Selon la presse, Cristina et Inaki ont pris connaissance du jugement à Genève, où ils vivent depuis 2013 avec leurs quatre enfants.

A Barcelone, l'avocat de la princesse, Miquel Roca, a déclaré à la presse que l'infante avait reçu la décision "avec satisfaction mais aussi (...) la contrariété de partager une condamnation avec son mari qu'elle considère injuste, parce qu'elle a toujours cru, elle croit et elle continuera à croire à l'innocence de son mari".

Cristina a toujours dit qu'elle ne savait rien des dossiers évoqués au procès et faisait pleinement confiance à son époux - ex-handballeur professionnel et double médaillé olympique - soutenu indéfectiblement depuis leur mariage en 1997.

Le procès des 17 prévenus s'était prolongé plus de cinq mois, sous l'oeil des médias qui diffusaient en direct sur internet certaines audiences.

L'affaire avait été révélée fin 2011 et avait d'autant plus choqué l'opinion que l'Espagne vivait sa pire crise économique depuis des décennies.

Le scandale avait précipité l'abdication en 2014 de Juan Carlos 1er et l'arrivée sur le trône de son fils Felipe VI, décidé à redorer l'image de la monarchie.

Depuis, le souverain a même banni sa soeur de tous les actes officiels de la royauté et lui a retiré son titre de duchesse de Palma.

Felipe VI n'a fait vendredi aucun commentaire. Le Palais royal a simplement exprimé "son plus grand respect pour l'indépendance du pouvoir judiciaire" tandis que le roi inaugurait tout sourire une exposition dans un musée madrilène.

Le procureur, Pedro Horrach, avait requis 19 ans et six mois d'emprisonnement à l'encontre de M. Urdangarin. Il avait demandé qu'une amende de quelque 980.000 euros lui soit infligée.

Mais ce même procureur avait pris clairement la défense de Cristina, en présentant les accusations contre elle comme un "échafaudage de soupçons et de conjectures applaudi par les médias".

La princesse n'avait finalement été jugée que sur plainte d'un collectif de défense des contribuables, Mains propres, considéré d'extrême droite.

Un énorme coup de théâtre avait marqué le procès, quand le dirigeant de Mains propres avait été emprisonné, soupçonné d'avoir codirigé un vaste système d'extorsion de fonds.

Dans cette affaire, Jaume Matas - ancien ministre (2000-2003) du gouvernement conservateur de José Maria Aznar (PP), a été condamné à trois ans et huit mois de prison, en tant qu'ex-président des Baléares.

M. Matas avait admis avoir donné l'ordre d'attribuer des contrats à la Noos - sans appels d'offres ni discussion des prix - parce que M. Urdangarin était alors le gendre du roi.

Avec AFP