La pratique est beaucoup plus intense à Shasha, un village situé à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de la ville de Goma.
Olivier Maheshe, un jeune homme de la région, y fait déjà son commerce."J'avais d'abord reçu cette information, puis je me suis rendu compte qu'un de mes anciens collègues faisait partie des acheteurs d'urine humaine. J'avais cherché dans notre famille et parmi ceux qui ne le savaient pas encore, et j'ai réalisé 20 litres. Je les ai vendus à 12 000 francs, et aujourd'hui il me reste deux bidons que je garde et que je pourrai vendre à 15 000 francs le bidon dès que l'achat reprendra", révèle-t-il.
Pour obtenir un stock important, chaque membre de l'association qui achète de l'urine humaine est obligé d'apporter au moins 5 litres par semaine, et la sensibilisation continue dans la communauté pour appeler les gens à venir vendre ces produits.
En plus du stock minimal de 5 litres,"la deuxième stratégie consiste à sensibiliser les personnes de la communauté qui apportent de l'urine, et nous achetons 5 litres à 3000 Francs", souligne Yves Shabwira, l'un des initiateurs du projet.
Lire aussi : Des ONG congolaises dénoncent un accord de concession de terres au RwandaL'urine est utilisée pour fertiliser le sol et tuer les insectes dans les champs, une pratique validée par les agronomes de la région qui estiment qu'elle n'est pas nouvelle.
"L'urine humaine est un engrais naturel et c'est une pratique très ancienne qui heureusement est remise au goût du jour. Vous savez que les plantes ont besoin de trois nutriments principaux dont l'azote, le phosphore et le potassium. Et vous comprendrez que dans un litre d'urine, il y a environ 6 grammes d'azote, 1 gramme de phosphore et 2 grammes de potassium ; donc tous les éléments dont la plante a besoin sont dans l'urine", explique Erick Musubao, ingénieur agronome.
Ce scientifique congolais rappelle que le danger ou l'importance de l'urine sur la plante dépend de son état, ce qui justifie la conservation pendant 30 jours des stocks faits par les agriculteurs de Shasha avant leur utilisation.
Lire aussi : Les agriculteurs zimbabwéens espèrent profiter du boom du cannabis thérapeutique"L'urine si vous l'utilisez à l'état pur, c'est-à-dire si vous urinez sur une plante, vous allez la brûler. Tout est une question de dosage (il faut diluer l'urine en mélangeant un peu d'eau), mais aussi il faut conserver l'urine pendant au moins un mois, ce temps de stockage va tuer le pouvoir acide de l'urine", ajoute-t-il.
Actuellement, de nombreux agriculteurs expérimentent cette méthode dans le territoire de Masisi et se vantent des résultats, ce qui laisse penser que le prix du litre d'urine humaine pourrait augmenter.