Rester ou partir : le Royaume-Uni vote pour son avenir et celui de l'Europe

A woman reads a newspaper on the underground in London with a 'vote remain' advert for the BREXIT referendum, Britain June 22, 2016.

Le résultat se joue sur le fil, mais un sondage publié jeudi en plein scrutin a partiellement rassuré les marchés financiers en donnant vainqueur le camp du "Remain" (rester).

Les Britanniques votaient nombreux jeudi sur leur appartenance à l'Union européenne lors d'un référendum historique qui doit décider de leur avenir et de celui du reste de l'Europe, où le scrutin était suivi avec fébrilité.

Le résultat se joue sur le fil, mais un sondage publié jeudi en plein scrutin a partiellement rassuré les marchés financiers en donnant vainqueur le camp du "Remain" (rester).

A l'issue d'une campagne passionnée, axée sur l'immigration et la prospérité économique, les électeurs se pressaient dans tout le pays, malgré la pluie balayant certaines régions dont Londres, pour déposer leurs bulletins de vote.

Les bureaux ont ouvert à 07H00 (06H00 GMT) et devaient fermer à 22H00 pour les 46,5 millions d'inscrits. Le résultat final devrait être annoncé vendredi au petit matin et le Royaume-Uni pourrait alors devenir le premier pays à choisir de quitter l'UE après 60 ans de construction européenne.

Un sondage Ipsos Mori-Evening Standard publié jeudi à 10H00 GMT, mais réalisé avant le vote, donnait une avance de quatre points au camp du maintien dans le giron européen, à 52% contre 48%, avec toutefois 12% d'indécis.

Sa publication a immédiatement accentué la hausse de la livre sterling face au dollar et à l'euro, tandis que la Bourse de Paris prenait près de 2% à la mi-journée, signe que les marchés tablent davantage sur une victoire du statu quo.

La prudence restait toutefois de mise, deux sondages parus mercredi ayant donné une légère avance à un Brexit, une sortie de l'Union.

- 'Un désastre' -

Dans les bureaux de vote, les électeurs étaient partagés, leurs témoignages traduisant les inquiétudes sur les conséquences d'un Brexit ou à l'inverse l'enthousiasme à l'idée de quitter l'UE.

"Ce serait un désastre pour l'économie si nous partions", estimait Peter Davies, 55 ans, employé dans le secteur informatique, devant un bureau de vote installé dans une bibliothèque municipale de Havering, à l'est de Londres.

Joan, la cinquantaine, regrettait elle l'époque où l'Europe comptait moins de pays membres, et espérait une victoire du Brexit.

"Nous serons les premiers à quitter (l'UE) et je pense que d'autres pays européens partiront après. Je crois que les électeurs français le veulent secrètement", a déclaré à l'AFP cette femme qui préférait taire son nom de famille.

Dans le nord-ouest du pays, à Glasgow, dans l'europhile Ecosse, nombre d'électeurs se disaient en faveur d'un "remain". "Ce serait idiot de quitter" l'union, assurait Gemma Rosaria, 24 ans. "Etre dans l'UE est un avantage pour l'Ecosse".

Le Premier ministre conservateur David Cameron, qui a mené campagne pour le statu quo et risque gros, a voté pour sa part dans la matinée à Londres, accompagné de sa femme Samantha, sans faire de déclaration.

Nigel Farage, le chef de l'Ukip, le parti europhobe et anti-immigration, a voté de son côté dans le sud-est de l'Angleterre et estimé que le camp du "Leave" avait une "grande chance" de l'emporter.

Selon les analystes, le niveau de la participation aura un impact décisif: plus elle sera importante, plus le "Remain" (Rester) aura ses chances.

Les électeurs devaient répondre à la question: "Le Royaume-Uni doit-il rester un membre de l'Union européenne ou quitter l'Union européenne?".

Jeudi, les journaux britanniques n'ont pas manqué pas de souligner le caractère historique du vote: "Le jour de l'indépendance", a titré le tabloïd The Sun (pro-Brexit), quand le quotidien The Times (pro-UE) parlait du "Jour du jugement dernier".

L'enjeu est de taille et tous les dirigeants européens sont intervenus pour retenir les Britanniques, conscients que leur départ ferait peser une menace de désintégration du club des pays membres de l'UE.

Outre les conséquences économiques immédiates pour le pays - forts remous sur les marchés, chute probable de la livre, emplois menacés à la City -, un Brexit serait dommageable à plus long terme, ont prévenu toutes les grandes institutions financières internationales, du FMI à l'OCDE.

Il ouvrirait aussi une période de turbulences politiques, avec un probable départ de David Cameron, qui a lancé ce référendum. Il pourrait aussi conduire les nationalistes écossais, europhiles, à organiser un nouveau référendum sur l'indépendance de leur province.

- Boîte de Pandore -

David Cameron, qui joue sa carrière et sa place dans l'Histoire, a plaidé jusqu'au dernier jour pour convaincre ses concitoyens de rester dans l'UE, martelant que le pays y serait "plus prospère, plus sûr et plus fort".

Côté Brexit, l'ex-maire de Londres, Boris Johnson, a pris la tête des conservateurs eurosceptiques et prédit des lendemains radieux aux Britanniques s'ils retrouvent leur "indépendance".

Voulant mettre un frein aux divisions qui rongent son Parti conservateur sur l'UE, M. Cameron avait annoncé en janvier 2013 qu'il tiendrait ce référendum s'il était réélu, ce qui fut le cas en 2015.

Mais il a ouvert la boîte de Pandore et déchaîné les passions, attisées par les redoutables tabloïds britanniques, toujours prompts à vilipender l'UE.

Dans cette atmosphère toxique, le meurtre de la députée pro-UE Jo Cox une semaine avant le scrutin, par un homme invoquant la "liberté pour le Royaume-Uni", a sidéré le pays, sans que l'impact de ce drame sur le vote ne puisse être mesuré.

Avec AFP