L'expulsion de migrants vers le Rwanda devant la Cour suprême britannique

Mi-2022, un premier vol avait été annulé après une décision de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).

Le Royaume-Uni expulsera-t-il un jour vers le Rwanda des migrants arrivés illégalement sur son sol ? Le gouvernement britannique a défendu lundi cette mesure phare de sa politique de lutte contre l'immigration clandestine devant la Cour suprême à Londres.

A l'issue de trois jours d'audience devant la plus haute juridiction britannique, la décision sera mise en délibéré, sans doute à plusieurs semaines, pour décider de l'avenir de cette mesure controversée.

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La semaine dernière encore lors du congrès de son parti conservateur, le Premier ministre Rishi Sunak a souligné qu'il ferait "tout ce qui sera(it) nécessaire pour arrêter les bateaux" de migrants qui traversent la Manche, sujet qu'il a érigé parmi ses priorités.

Vertement critiqué, le projet d'expulser des migrants, d'où qu'ils viennent, vers le Rwanda reste pour l'heure bloqué par la justice. Mi-2022, un premier vol avait été annulé après une décision de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).

Fin juin, la cour d'appel de Londres a jugé le projet "illégal", estimant que le Rwanda ne pouvait en l'état être considéré comme un "pays tiers sûr". Il existe "un risque réel que les personnes envoyées au Rwanda soient renvoyées dans leur pays d'origine où elles étaient en proie à des persécutions et autres traitements inhumains", avait conclu la cour.

Le gouvernement a porté l'affaire la Cour suprême. Devant les cinq hauts-magistrats lundi, James Eadie, avocat du ministère de l'Intérieur, a souligné la "nécessité pressante de prendre des mesures qui aient un effet dissuasif" pour ceux qui entreprennent ces périlleuses traversées, "facilitées par des passeurs". Face à la Cour, l'avocat a défendu les garanties apportées selon lui par le projet.

"Extrêmement coûteux"

Les conservateurs se trouvent largement distancés par l'opposition travailliste dans les sondages en vue des prochaines élections législatives, attendues l'année prochaine. Dimanche, le chef de l'opposition travailliste Keir Starmer a dit qu'il reviendrait sur le projet d'expulser des migrants vers le Rwanda, s'il devenait Premier ministre. "Ce n'est pas la bonne politique et c'est extrêmement coûteux", a-t-il déclaré sur la BBC. Il a promis de collaborer avec d'autres pays pour "démanteler les gangs criminels qui se livrent au commerce ignoble" du trafic de migrants.

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Le gouvernement ne cesse de durcir son discours sur l'immigration. En juillet, Londres a voté une loi interdisant aux migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni de demander l'asile, sans tenir compte des raisons qui les ont poussés à fuir leur pays. L'ONU a dénoncé une loi contraire au droit international et s'est inquiétée que "d'autres pays, y compris en Europe" soient tentés de suivre ce chemin.

En septembre, la ministre de l'Intérieur britannique Suella Braverman, très à droite, a attaqué la Convention de Genève, qui définit depuis 1951 le statut de réfugié, jugeant qu'elle n'était pas "adaptée à notre époque moderne". Elle s'en prend régulièrement aussi à la CEDH.

Mardi dernier, au congrès du parti conservateur, elle a mis en garde contre "l'ouragan" migratoire "qui arrive", accusant l'opposition travailliste de vouloir "ouvrir les frontières". Elle a agité le spectre de "millions" de migrants supplémentaires qui arriveraient sur les côtes britanniques, un flux "incontrôlé et ingérable" à moins que le gouvernement qui sera au pouvoir l'année prochaine n'agisse "de manière décisive".

Depuis janvier, plus de 25.000 migrants ont traversé la Manche. Le gouvernement se vante d'avoir réussi, avec sa politique, à enclencher une baisse, après une année record en 2022, avec plus de 45.000 traversées sur douze mois. Mais le nombre des demandeurs d'asile en attente d'une décision des autorités britanniques a atteint un nouveau record fin juin: 175.457 personnes attendaient une décision initiale relative à leur demande, soit 43% de plus qu'un an auparavant.

Vendredi, Rishi Sunak et la Première ministre italienne Giorgia Meloni, cheffe du parti post-fasciste Fratelli d'Italia, ont appelé dans une tribune commune les Etats européens à agir urgemment face à la "crise morale" incarnée par l'immigration illégale. C'est une "crise européenne", ont-ils écrit, car ce sont aux Etats européens "de décider qui vient en Europe, et pas aux passeurs et aux trafiquants".

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