Sénégal: les syndicats de la presse réclament la libération d'un journaliste

Des membres de la coordination des associations de presse du Sénégal (CAP) lors de leur conférence de presse, à Dakar, le 7 novembre 2022.

Les syndicats de la presse au Sénégal ont réclamé lundi la libération immédiate d'un journaliste critique du pouvoir, dont ils disent vouloir faire une cause symbolique dans une période de pressions grandissantes sur la profession.

Pape Alé Niang, directeur du site d'informations privé Dakar Matin, a été interpellé dimanche. Il a été placé en garde à vue pour des publications qui ont coïncidé avec l'interrogatoire récent de l'opposant Ousmane Sonko par la justice. L'affaire Sonko est source de tensions depuis des mois.

M. Sonko a été inculpé pour viols et menaces de mort et placé sous contrôle judiciaire en mars 2021, sur plainte d'une employée d'un salon de beauté où il allait se faire masser. Il dénonce un complot du pouvoir pour torpiller sa candidature à la présidentielle de 2024. Il a été entendu pour la première fois sur le fond de l'affaire le 3 novembre.

Les autorités reprochent à Pape Alé Niang d'avoir diffusé des messages confidentiels sur le dispositif sécuritaire à mettre en place pour la comparution de M. Sonko devant le juge, ont dit les organisations de presse devant les journalistes. Elles lui reprochent aussi d'avoir appelé à descendre dans la rue, ont-elles dit.

La Coordination des associations de presse, collectif de syndicats de la profession, "exige sa libération immédiate et sans conditions", déclare-t-elle dans un communiqué. Elle s'insurge contre les "dérives totalitaires" de l'Etat sénégalais et la "diabolisation de la presse", de la part du pouvoir comme de l'opposition.

Ibrahima Lissa Faye, président d'Appel, l'une des composantes de la coordination, a rapporté devant les journalistes une forte dégradation des conditions d'exercice de la profession depuis avant les émeutes de mars 2021.

"Des journalistes ont été violentés, malmenés par les forces de l'ordre, par les manifestants (...) Les menaces sont de plus en plus réelles et nous craignons pour nos vies", a-t-il dit. Il a évoqué le recul en un an du Sénégal de la 49ème à la 73ème place en 2022 du classement de Reporters sans frontières sur la liberté de la presse.

"Aujourd'hui, c'est Pape Alé; demain ça peut être quelqu'un d'autre", a-t-il déclaré en prévenant que les menaces, provenant des milieux politiques, religieux et économiques selon lui, risquaient de grandir encore avec l'approche de la présidentielle.