Le fils du défunt président, Mahamat Idriss Déby, 37 ans, général peu connu et sans expérience politique, semble concentrer tous les pouvoirs à la tête d'un Conseil militaire de transition (CMT) de 15 généraux parmi les plus fidèles à son père, qui dirigeait d'une main de fer ce vaste pays désertique.
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L'armée est-elle unie ?
L'armée est le pilier depuis 30 ans d'un régime militaire de facto.
Depuis son coup d'Etat en 1990, Idriss Déby a placé ses proches à des postes-clés de l'armée, essentiellement membres de son ethnie, les Zaghawa. Mais depuis le début des années 2000 et plus encore ces derniers mois, l'unité de ce clan s'est fissurée, et il avait dû écarter certains officiers "douteux", selon des proches du Palais.
Dès l'annonce de l'installation du CMT, malgré l'unité affichée de ses plus hauts cadres derrière Mahamat Déby, quelques dissensions sont apparues publiquement. Le général Idriss Mahamat Abderamane Diko, un proche du défunt, a qualifié sur les ondes de VOA Afrique le CMT de "petit cercle qui veut sortir du cadre légal".
"Il n'y a pas d'unité de l'armée derrière Mahamat Idriss Déby, il y a des tensions internes", estime Kelma Manatouma, chercheur tchadien en sciences politiques à l'université Paris-Nanterre.
"Il y a des risques d'affrontement, certains groupes peuvent se sentir marginalisés et il peut y avoir des règlements de comptes, une 'Nuit des longs couteaux'", abonde Roland Marchal, chercheur au Centre de recherches internationales (Ceri) de Sciences Po Paris. Mahamat Idriss Déby "est beaucoup trop jeune et n'est pas spécialement aimé par les autres officiers", poursuit M. Marchal.
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Une rébellion menaçante ?
Les rebelles du Front pour l'alternance et la concorde au Tchad (FACT), ont lancé le 11 avril à partir de la Libye une offensive dans le nord du Tchad. De violents combats ont eu lieu le week-end dernier à environ 300 kilomètres au nord de N'Djamena. L'armée, et des observateurs étrangers, assurent que le FACT a subi de lourdes pertes qui l'empêchent dans l'immédiat de menacer la capitale.
Mais le ralliement d'autres groupes rebelles, qui verraient dans la mort du "chef" et d'éventuels tiraillements dans l'armée une bonne opportunité, pourrait changer la donne.
Dimanche, l'Union des forces de la résistance (UFR), un groupe rebelle majoritairement zaghawa, a annoncé soutenir le FACT, composé essentiellement de Gorane, une puissante ethnie du Nord.
"Les rebelles du FACT peuvent repartir à l'assaut mais leur capacité militaire est limitée", avance Roland Marchal. "Plusieurs groupes peuvent aussi se coaliser et poser des problèmes mais ils échoueront car la France, très présente au Tchad, ne laissera pas faire".
Paris, qui considère le Tchad comme un allié essentiel contre les jihadistes au Sahel, a sauvé militairement à deux reprises au moins le régime d'Idriss Déby face à des rebelles: en 2008 et en 2019. Et le président Emmanuel Macron sera vendredi aux funérailles, aux côtés de son fils.
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Une transition politique ?
L'opposition a dénoncé un "coup d'Etat institutionnel" mais elle est elle-même très divisée et n'avait pas réussi à présenter un candidat unique lors de la présidentielle du 11 avril. Elle était aussi très violemment réprimée dans la rue avant le scrutin.
"Je crois qu'il y a lieu de mettre en place d'urgence un dialogue", a dit l'opposant historique à Idriss Déby, Saleh Kebzabo, dans un entretien avec l'AFP, au lendemain de l'instauration du CMT.
Tout comme l'opposition tchadienne, le gouvernement américain insiste sur une transition conforme à ce que dicte la Constitution.
"Les États-Unis se tiennent aux côtés du peuple tchadien en cette période difficile.Nous sommes en faveur d'une transition pacifique du pouvoir en accord avec la constitution tchadienne", a déclaré Ned Price, porte-parole du Département d'Etat.
D'immenses défis économiques ?
Le Tchad est le troisième pays le moins développé au monde, selon l'ONU. En 2018, 42% de la population vivait sous le seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale, malgré une rente pétrolière conséquente: l'or noir génère près de 40% du PIB et plus de 60% des revenus de l'État.
Mais Idriss Déby et les Zaghawa sont accusés par l'opposition et les ONG internationales d'avoir "confisqué" toutes les ressources de l'Etat depuis 30 ans.
"Beaucoup de jeunes diplômés ne trouvent pas de travail et sont parfois contraints d'être chauffeur de taxi et ce mécontentement social est un danger pour le pouvoir", conclut Kelma Manatouma.