Torture en Syrie: plainte d'une famille pour qu'une enquête soit ouverte à Paris

Quelques personnes se rassemblent autour des bâtiments en feu après une attaque à la bombe dans la banlieue de Sayyida Zeinab, à Damas, Syrie, 11 juin, 2016. (SANA via AP)

La famille d'un médecin syrien mort à 37 ans dans une prison du régime de Bachar al-Assad en 2014 a porté plainte à Paris pour qu'une enquête soit ouverte pour torture et assassinat.

La plainte avec constitution de partie civile a été déposée par son frère, installé de longue date en France et qui a la double nationalité franco-syrienne.

Selon elle, Hicham Abdul Rahman, qui s'était engagé pour l'accès aux soins des blessés lors des premières manifestations contre le régime en 2011, a été arrêté en avril 2012, détenu dans les centres des services secrets des forces aériennes puis à la prison de Sednaya, où sa famille avait pu le voir très brièvement en mai 2014.

"Il était tellement méconnaissable qu'ils ne l'ont pas reconnu immédiatement", raconte à l'AFP Me Joseph Breham. "En décembre (2014), les services de sécurité ont fait signer à la famille un certificat de décès pour crise cardiaque, comme c'est le cas systématiquement", ajoute l'avocat.

Depuis le début du conflit, né d'un soulèvement populaire en 2011, le régime de Bachar al-Assad a été accusé à de nombreuses reprises de massacres, d'usage d'armes chimiques et de torture.

En février, les enquêteurs de l'ONU ont accusé le régime de Damas d'"extermination" de détenus, affirmant que les morts massives de prisonniers sont le résultat d'une "politique d'Etat". Les jihadistes du groupe Etat islamique sont également accusés de crimes de guerre et crimes contre l'humanité.

Selon la plainte, la justice française est compétente au motif que le frère du médecin est une victime directe de la disparition, des tortures et de la mort d'Hicham Abdul Rahman.

Pour l'avocat, l'objectif est double: d'une part, "que toute la lumière soit faite" sur l'arrestation, la détention, la mort et les possibles sévices subis par Hicham Abdul Rahman. D'autre part, "la realpolitik risque d'impliquer que Bachar al-Assad redevienne un acteur à part entière de la communauté internationale. Cette plainte imposera aux politiques d'assumer leur choix: réintégrer un assassin au motif que Daech c'est pire", explique Joseph Breham, en utilisant l'acronyme arabe de l'EI.

En septembre 2015, le parquet de Paris avait ouvert une enquête préliminaire pour "crimes contre l'humanité" en Syrie, en s'appuyant sur le témoignage de "Cesar". Cet ancien photographe de la police militaire s'est enfui de Syrie en 2013, en emportant 55.000 photographies effroyables de corps torturés.

Au moins deux autres procédures, sur lesquelles très peu d'information ont filtré, sont aussi en cours en France, selon des sources proches du dossier.

Avec AFP