Une tatoueuse tunisienne ressuscite les dessins berbères traditionnels

Manel Mahdouani, une tatoueuse tunisienne qui fait revivre les dessins berbères traditionnels, tatoue une cliente à Tunis, Tunisie le 2 septembre 2022. (Photo Reuter/Jihed Abidellaoui)

Si la tendance pousse de plus en plus de gens, surtout les jeunes, à se faire tatouer le corps avec des dessins de diverses significations, les tatouages datent d’il y a très longtemps dans des pays comme la Tunisie, où la tatoueuse Manel Mahdouani fait revivre les dessins berbères traditionnels.

Longtemps considérés comme démodés, les tatouages berbères traditionnels gagnent en popularité auprès d'une nouvelle génération branchée.

Dans ce qu’on pourrait appeler son laboratoire, Manel Mahdouani est à l’œuvre…Cette tatoueuse renoue avec la tradition amazighe pour cette nouvelle génération à la mode.

"J'ai d'abord fait des tatouages habituels, puis je me suis dit pourquoi ne pas me spécialiser dans quelque chose qui fait une différence dans ma façon de travailler. J'ai trouvé que les tatouages amazighs ne sont pas si courants en Tunisie, et cela fait partie de notre patrimoine”, confie Manel Mahdouani.

Souvent appelés Berbères par les étrangers, les Amazighs sont des descendants de groupes indigènes d'Afrique du Nord. Chez eux, se faire tatouer faisait partie de la tradition. Pour comprendre cela nous nous rendons à Bou-hajla, un village près de la ville de Kairouan, à 150 km de Tunis. La vieille Seiada Issaoui, elle-même Amazighe tatouée, nous a conduits chez elle pour nous expliquer cette tradition.

"Tout le monde était tatoué. Ils étaient tatoués sur les jambes, les bras et la poitrine. Une femme sans tatouages était perçue comme un homme, seuls les hommes n'ont pas de tatouages. Une femme a un tatouage sur le visage pour être identifiée comme telle”, se rappelle la vieille Issaoui.

Fatma Tarnouni une femme berbère de 106 ans de la région de Chaouia, a été tatouée à l'âge de 10 ans par un homme de la région saharienne. "C'était la règle, c'était à la mode aussi. Toutes les filles étaient tatouées. Pour être belle, il fallait être tatouée, alors je l'ai fait”, soutient-elle.

Datant de 6.000 ans, les signes extérieurs de l'identité culturelle amazighe étaient relégués à l'artisanat produit en masse pour les touristes. Mais certains jeunes s'intéressent désormais à leurs racines berbères et se tournent vers Mahdouani pour les y relier par des tatouages. C’est le cas de Loula.

“Les symboles sur le visage ou les mains des femmes représentaient la tribu à laquelle elles appartenaient, la maison de leurs pères, celles de leurs maris, ça indiquait si elles sont mariées ou non, et toutes ces informations sont encrées sur elle... Je trouve que toutes ces choses sont comme une carte d'identité. Cela signifie que l'histoire d'une femme est écrite sur elle et c'est ce que je fais. C'est comme un mur Facebook et c'est mon mur”, explique Loula.

Peu de Tunisiens parlent désormais les langues berbères que l'on trouve plus couramment en Algérie et au Maroc.

Manel Mahdouani, qui étudie la tradition "tekaz" des tatouages berbères, ne manque pas d’occasion de collecter des dessins pour enrichir son catalogue de tatouages qu’elle propose à ses clients.