Paul Manafort, sulfureux lobbyiste tombé dans l'affaire russe

Le président de la campagne Trump, Paul Manafort, lors de la convention nationale républicaine au Quicken Loans Arena, le 17 juillet 2016, à Cleveland.

Formellement inculpé lundi dans l'affaire russe, Paul Manafort est un lobbyiste expérimenté, habitué des cercles politiques de Washington, qui a conseillé plusieurs présidents américains et même quelques dictateurs étrangers, avant de brièvement prendre les rênes de la campagne présidentielle de Donald Trump.

Le stratège républicain de 68 ans a dirigé la campagne de Donald Trump de juin à août 2016, après le limogeage de Corey Lewandowski, le premier directeur de campagne de l'homme d'affaires. Il avait notamment pour tâche de rassurer les dirigeants du parti décontenancés par le succès du milliardaire new-yorkais auprès des électeurs républicains.

Rapidement, son goût pour de juteux contrats de consultant politique auprès de sulfureux dirigeants étrangers l'a rattrapé. Les révélations selon lesquelles il faisait l'objet d'une enquête pour avoir reçu plusieurs millions de dollars de l'ex-président ukrainien pro-russe, Viktor Ianoukovitch, l'ont poussé à la démission le 19 août 2016.

C'est cette affaire qui a conduit le procureur spécial Robert Mueller à l'inculper dans le cadre de l'enquête sur l'ingérence russe dans la présidentiel ainsi que les liens entre la Russie et la campagne Trump.

Paul Manafort fait l'objet de 12 chefs d'inculpation, parmi lesquels complot contre les Etats-Unis, blanchiment, fausses déclarations et non déclarations de comptes détenus à l'étranger, a annoncé lundi le porte-parole de M. Mueller.

Plus de 75 millions de dollars ont transité par des comptes offshore gérés par Paul Manafort et l'un de ses associés. Paul Manafort est accusé d'avoir blanchi à lui seul 18 millions de dollars.

Il s'est rendu de lui-même lundi matin dans les bureaux du FBI à Washington et doit comparaître devant une juge dans la journée.

Dictateurs et oligarques

Après avoir conseillé les présidents Gerald Ford dans les années 1970 et Ronald Reagan dans les années 1980, Paul Manafort s'est tourné vers des dirigeants étrangers prêts à payer des millions de dollars pour améliorer leur image à Washington : le dictateur philippin Ferdinand Marcos, le Somalien Mohamed Siad Barré ou Jonas Savimbi en Angola.

Viktor Ianoukovitch s'est attaché ses services au milieu des années 2000, alors qu'il mettait sur pied un parti qui l'a emmené à la présidence, avant d'être chassé du pouvoir en 2014.

Son ancien partenaire de lobbying, Roger Stone, un conseiller politique du président Richard Nixon aux méthodes controversées, l'a ensuite fait entrer dans la campagne présidentielle de Donald Trump.

"Paul est un vrai professionnel et je lui souhaite le plus grand succès", avait déclaré Donald Trump après sa démission.

La Maison Blanche a cependant minimisé sa contribution. Paul Manafort "a joué un rôle très limité pour un temps très limité", avait déclaré en mars l'ex-porte-parole du président, Sean Spicer.

L'acte d'inculpation de M. Manafort ne suggère pas de collusion entre l'équipe du candidat républicain et les autorités russes. Il menait toutefois des activités de conseil auprès d'oligarques milliardaires liés à Moscou.

Il a également participé à une réunion de Donald Trump Jr. avec une avocate russe liée au Kremlin qui voulait offrir à l'équipe de campagne des informations préjudiciables sur Hillary Clinton, en juin 2016, dans la Trump Tower.

Avec AFP