Venezuela : les forces de l'ordre bloquent l'accès des députés au Parlement

Venezuela

Les forces de l'ordre vénézuéliennes bloquaient mardi l'accès à l'Assemblée nationale, seule institution contrôlée par l'opposition au président Nicolas Maduro. Le pouvoir chaviste poursuivait son offensive contre l'opposition autour de Juan Guaido, deux semaines après le soulèvement manqué.

Depuis l'aube mardi, des effectifs de la police, de la Garde nationale bolivarienne, un corps militarisé, et des services de renseignement (Sebin) étaient postés autour du Palais fédéral et en interdisaient l'accès aux députés ainsi qu'aux journalistes, a constaté l'AFP.

"Des agents du Sebin ont investi le Palais fédéral en prétextant la présence d'engins explosifs à l'intérieur", s'est insurgée la députée Manuela Bolivar, dans une interview à l'AFP.

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Les parlementaires devaient débattre des poursuites contre dix de leurs pairs accusés par la Justice d'avoir "activement" soutenu le soulèvement manqué du 30 avril, auquel avait appelé Juan Guaido.

Le gouvernement de Nicolas Maduro tente "de kidnapper le pouvoir législatif, alors que le dictateur est retranché, seul, dans un palais où il ne devrait pas se trouver, soupçonneux de tout son entourage", a accusé le chef de file de l'opposition sur Twitter.

Depuis l'échec de son appel à la rébellion il y a tout juste deux semaines, le pouvoir chaviste concentre son offensive sur l'Assemblée nationale, seule institution qui lui échappe, en pourchassant les "traîtres" responsables, à ses yeux, de cette opération.

Dix députés d'opposition ont déjà vu leur immunité parlementaire levée par l'Assemblée constituante, créée, elle, par le pouvoir en 2017 et uniquement composée de fidèles à Nicolas Maduro.

Edgar Zambrano, le vice-président de l'Assemblée nationale, a été arrêté et transféré dans une prison militaire, tandis que trois députés sont réfugiés dans des résidences diplomatiques et un autre a fui en Colombie voisine.

-"Usage excessif de la force"-

Juan Guaido, reconnu président par intérim par une cinquantaine de pays, tente de déloger Nicolas Maduro du pouvoir depuis fin janvier. Il le qualifie de "dictateur" et d'"usurpateur" en raison de l'élection présidentielle "frauduleuse" de l'an dernier qui a permis au chef de l'Etat de se maintenir au palais de Miraflores.

L'opposant de centre droit âgé de 35 ans dit avoir le soutien de la rue. Mais les nombreuses manifestations anti-Maduro auxquelles il appelle font de moins en moins recette.

Ces manifestations ont parfois été émaillées de violents heurts avec les forces de l'ordre.

Et lors de manifestations en janvier, le gouvernement a fait un "usage excessif de la force", "de manière systématique et généralisée", s'est indignée Amnesty International dans un rapport publié mardi.

L'ONG de défense de droits de l'homme appelle la Cour pénal internationale (CPI) à enquêter sur des "crimes contre l'humanité" qui pourraient avoir été commis en janvier, au moment de la proclamation de Juan Guaido comme président par intérim.

Amnesty dénonce notamment des "exécutions extrajudiciaires sélectives, des détentions arbitraires ainsi que des décès et des blessures causées par l'usage excessif de la force" par le gouvernement. Elle a recensé la mort de 47 personnes tuées par armes à feu durant les manifestations à travers le pays entre le 21 et le 25 janvier.

Au plan international, Nicolas Maduro, président depuis la mort de son mentor Hugo Chavez en 2013, a notamment le soutien de l'Iran et de la Russie.

A l'inverse, les Etats-Unis soutiennent Juan Guaido, qu'ils reconnaissent comme président par intérim. Ils ont mis en place de nombreuses sanctions contre des responsables du gouvernement Maduro pour tenter de le pousser vers la sortie.

Mardi, le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a justement appelé Moscou à "cesser" de soutenir Nicolas Maduro, lors d'une conférence de presse avec son homologue russe Sergueï Lavrov à Sotchi. Sa demande a été fermement rejetée par la Russie.

Juan Guaido a, lui, demandé à son représentant à Washington de prendre contact avec le commandement américain pour l'Amérique du Sud (Southcom).

Carlos Vecchio a donc écrit à l'amiral Craig Faller, qui dirige le Southcom, pour mettre en place une "coopération stratégique et opérationnelle afin d'en finir avec la souffrance de notre peuple et restaurer la démocratie".

A Washington, la tension était forte autour de l'ambassade du Venezuela mardi. La police a entrepris lundi soir de déloger des militants américains qui occupent le bâtiment pour tenter d'empêcher Carlos Vecchio d'y entrer.