Comme si Ouidah n’avait fait que veiller, attendant les premières heures du jeudi 9 janvier 2025 pour entrer dans la célébration de la deuxième édition des Vodun days. Les Béninois ainsi que les touristes ayant bravé des kilomètres ont envahi três tôt les lieux apprêtés pour accueillir les différentes festivités triées sur mesure pour la valorisation de ce patrimoine ancestral.
Hounsi est un adepte du Vodun Thron. Il a attendu avec impatience cette deuxième édition qui selon elle, lui donne la possibilité de faire connaître la divinité qui l’a sauvée. « J’avais tout perdu, tout ce que je touchais se résolvait par un échec.
« Mais il a fallu que je me soumette à la volonté de mes ancêtres pour que tout se mette sur les rails dans ma vie », a –t-elle souligné
« Pour moi ces célébrations sont très importantes. Je sais ce que le Vodun m'a apporté dans ma vie. J'avais tout perdu, mais depuis que j'ai accepté le Vodun dans ma vie, je suis bien. Les choses que j’avais du mal à avoir à force de sacrifices et d’efforts, je les ai comme s’il ne suffisait que de demander. Le Vodun pour moi est une bénédiction. »
Lire aussi : Le Bénin veut déconstruire les préjugés autour du VodunLors du lancement du premier Programme d’action du gouvernement (Pag 1), le vendredi 16 décembre 2016, Patrice Talon donnait une idée de cette initiative majeure dans l’élan de valorisation du patrimoine culturel. Pour cette édition, il y a bien plus de monde que l'année passée.
Eloi Agbo est l'administrateur de l'emblématique place des pythons, un sanctuaire Vodùn situé à Ouidah et qui abrite une multitude de pythons royaux vénérés par les xwédah depuis la fin du XVIIe siècle. « Ce magnifique lieu, en face duquel a été construite la basilique de l’Immaculée Conception de Ouidah, témoigne de l’importance de la tolérance interreligieuse au Bénin », explique l’administrateur principal.
« Il n'y a pas de Vodun Days sans un détour au temple des pythons. Ici, c'est un lieu sacré. Pour le caractère culturel, nous avons plus de 200 à 300 pythons et l’aspect cultuel, il y en a environ 100. Bien qu’ici soit le temple des pythons, nous n’avons que le mâle ici. La femelle est ailleurs car les deux ne doivent pas vivre au même endroit. On reconnait le mâle par sa petite taille et la femelle est plus élancée, environ 1m51 parce qu’elle doit porter des œufs. Et nous sommes en face de la cathédrale tout en visant dans l'harmonie et la fraternité»
Les Vodun Days sont d’abord une occasion de célébrer les racines sociales et cultuelles du Bénin, dont le Vodun fait partie intégrante. Bien que cette pratique spirituelle soit souvent perçue à travers le prisme du mysticisme et des rites religieux, l’événement se concentre davantage sur l’aspect culturel et patrimonial de cette tradition. Le professeur Mahougnon Kakpo est le président du comité des rites vodoun. Il souligne que que « l’un des objectifs derrière le Vodun Days est de déconstruire le mythe, les préjugés qui entourent cette spiritualité ».
Lire aussi : Le Bénin assume son statut de berceau du Vodun« Le Vodun est une religion, il faut le comprendre comme ça. Et vous savez les éléments fondamentaux d’une religion. Et tous ces éléments-là sont présents dans le Vodun. En tant que tel, le Vodun nous inscrit dans le sacré. Et le sacré, lorsque l’on a l’intention de bâtir autour de lui une entreprise touristique, il faut faire très attention. C’est pour cela que le comité des rites est composé de personnes qui connaissent et qui pratiquent le Vodun dans toutes ses déclinaisons. Et qui peuvent dire au gouvernement ceci que vous voulez nous montrer ne peut pas être montrer dans tel aspect ou dans tel autre aspect", poursuit le professeur Mahougnon Kakpo.
"Voilà donc le caractère technique et l’une des notions essentielles du comité des rites Vodun. Le comité des rites Vodun a également pour mission de labeliser les éléments qui doivent être montrés. On ne peut pas montrer n’importe quoi et on ne peut pas montrer le Vodun dans toute sa quintessence", conclut-il.
Sur le terrain, les populations accueillent avec fierté cette édition, célébrant la promotion du Vodun comme vecteur de développement. En témoigne l’engouement enregistré chez toutes les catégories sociales et dans le rang des touristes venus de différents continents et qui révèle le rôle que joue désormais le Bénin dans la promotion du dialogue inter-religieux.
La ferveur et l’enthousiasme remarqués sur les différents sites dédiés aux animations des fidèles de couvents Vodun et au Village des festivités ont permis aux publics de découvrir le Vodun dans toute sa beauté et sa splendeur. Julien Abodji est chrétien catholique. En tant qu’économiste de formation, il estime que si « le Vodun peut être un vecteur de développement, tous les Béninois doivent s’unir pour porter très haut cet idéal »
« Moi je suis fier, heureux de voir un héritage ancestral hissé sur le toit du monde. ..... Je suis économiste et je réfléchis avant tout comme tel. Je suis pour toutes idées novatrices qui permettent le développement.... Même si beaucoup sont devenus chrétiens, on n'a pas le droit d'oublier nos racines ».
Les plus heureux depuis jeudi sont les fidèles du Vodun. Ils apprécient cette grosse attraction autour de ce patrimoine culturel, cultuel et spirituel. Hounnon Atchèdji est un prêtre de la divinité Sakpata (Dieu de la Terre).
Lire aussi : Bénin : Exposition à la forêt classée de Pahou, des artistes plasticiens engagés pour la protection de la nature« Nous sommes fiers de partager la richesse et la diversité de notre identité avec nos frères et sœurs de l’Afrique et de la diaspora, les touristes et le monde entier. Je suis heureux et très honoré d’être encore de ce monde pour vivre cette grande mobilisation impressionnante du public et cette liesse populaire autour du seul héritage pour lequel je me suis battu toute ma vie »
Plusieurs responsables des autres religions ont été rencontrés sur les différents sites d’animation des Vodun Days. C’est le cas de Ernest Agbani, supérieur de l’église du Christianisme Céleste. Pour lui, « Dieu est amour et se trouve au cœur de toutes les religions, même le vodun »
« On ne peut pas vivre dans un état laic et continuer à se faire la guerre. J’ai entendu des dignitaires dire que le Vodun prône l’amour le vivre ensemble et l’acceptation de l’autre. Donc je suis pour montrer mon approbation à ce qu’on porte haut l’étendard de notre héritage ancestral. C’est ce que nous avons de sacré et c’est plus important »
Une loi votée en septembre 2024 institue deux jours fériés à l’occasion de cette célébration. Si Certains estiment qu’il s’agit d’une part belle faite aux religions endogènes, pour d’autres, ce n’est que justice rendue pour tous ceux qui portent en eux et autour d’eux, le Vodun.
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