"La Russie doit admettre qu'elle n'est pas capable de mettre fin au conflit syrien, ou alors qu'elle ne le souhaite pas", a déclaré le commandant des Forces américaines au Moyen-Orient (CENTCOM), le général Joseph Votel. "Je pense que leur rôle est extrêmement déstabilisant à ce stade".
"Moscou joue à la fois le rôle de pyromane et celui de pompier, en attisant le conflit entre le régime syrien, les YPG (la milice kurde alliée des Etats-Unis, ndlr) et la Turquie, et affirmant ensuite jouer un rôle d'arbitre pour résoudre le conflit", a accusé le général Votel qui témoignait devant une commission du Congrès.
Il a souligné que Moscou avait "échoué" à faire respecter le cessez-le-feu réclamé par les Nations unies.
Mardi, quatre jours après le vote par le Conseil de sécurité de l'ONU, au terme d'âpres discussions notamment avec Moscou, d'une résolution réclamant une trêve "sans délai" de 30 jours dans tout le pays, raids aériens et tirs de roquettes ont été rapportés dans l'enclave rebelle de la Ghouta orientale, près de Damas.
"Moscou continue de plaider pour des solutions diplomatiques parallèles aux initiatives diplomatiques occidentales en Syrie (...), en tentant d'affaiblir le rôle de l'ONU et de limiter les progrès de l'influence américaine", a poursuivi le général Votel, qui commande les forces américaines participant aux deux coalitions internationales dirigées par les Etats-Unis, en Afghanistan et en Irak et Syrie.
Engagée militairement depuis 2015 en Syrie, la Russie a changé la donne dans le conflit en volant au secours de l'armée syrienne. Depuis fin 2016, la Russie et l'Iran, alliés du régime, et la Turquie, soutien des rebelles, ont organisé à Astana (Kazakhstan), sans l'implication de Washington, des négociations entre des représentants du régime et des groupes rebelles.
- 'Ecarter les Etats-Unis' -
Le général Votel a expliqué que la Russie utilisait en Syrie ses liens avec l'Iran et la Turquie pour isoler les Etats-Unis dans la région. "Bien qu'historiquement rivaux, Moscou et Téhéran ont des intérêts communs dans la région, notamment un désir fondamental d'écarter, si ce n'est expulser, les Etats-Unis de la région", a-t-il dit.
Il a rappelé que la lutte contre l'EI n'était pas achevée, justifiant ainsi le maintien de soldats américains sur le sol syrien, mais il s'est bien gardé d'élargir leur mission à une lutte d'influence avec l'Iran, l'ennemi juré de Washington. "Contrer l'Iran n'est pas une des missions de la coalition en Syrie", a-t-il noté.
Interrogé par un élu sur l'attaque récente contre une position des alliés des Etats-Unis dans la vallée de l'Euphrate, attribuée par les médias américains à des mercenaires russes, il s'est abstenu de désigner Moscou. "Nous les avons caractérisées comme des forces pro-syriennes à ce stade", s'est-il contenté de répondre, promettant d'en dire plus lors d'une session à huis clos, aussitôt après l'audition publique.
Le 7 février, Washington a annoncé avoir tué dans des frappes aériennes au moins 100 combattants pro-régime dans la région de Deir Ezzor, en riposte à l'attaque du QG de combattants kurdes et arabes syriens soutenus par les Etats-Unis, où se trouvaient des soldats américains.
Moscou a reconnu que cinq Russes avaient été tués et plusieurs autres blessés, précisant qu'ils n'appartenaient pas à l'armée russe.
De nombreux ressortissants russes combattent en Syrie comme mercenaires oeuvrant pour le compte d'une compagnie militaire privée appelée Wagner. Les sociétés militaires privées sont officiellement interdites en Russie, mais la présence en Syrie de cette organisation, qui a aussi combattu dans l'est de l'Ukraine, a été abondamment documentée.
Avec AFP