Xi Jinping appelle à un nouveau départ pour les relations entre l'Inde et la Chine

Narendra Modi et Xi Jinping à Ahmadabad en Inde le 7 septembre 2014.

Le président chinois Xi Jinping a appelé vendredi à ouvrir "un nouveau chapitre" des relations entre Pékin et New Delhi, lors d'un "sommet informel" en Chine avec le Premier ministre indien Narendra Modi, à l'heure où les deux géants asiatiques cherchent à surmonter les vives tensions nés de leurs différends frontaliers.

M. Xi a accueilli le chef du gouvernement indien dans le musée provincial de la ville de Wuhan (centre de la Chine), pour ce qui a été présenté comme "un sommet informel" devant se prolonger samedi.

"J'espère que le Premier ministre et moi-même pourrons ouvrir un nouveau chapitre des relations sino-indiennes durant cette rencontre", a déclaré le président chinois selon la télévision étatique CCTV, vantant la "bonne relation de travail" entre les deux pays.

"Je veux que l'amitié de nos pays se renforce indéfiniment, comme le fleuve Yangtsé coule inlassablement", s'est-il exclamé.


La Chine et l'Inde représentant ensemble 40% de la population mondiale, ils ont "la responsabilité" de s'attaquer aux grands défis planétaire, et le sommet de Wuhan est "une belle opportunité" de le faire, a répondu M. Modi.

Dans les propos rapportés par les médias d'Etat, aucun des deux dirigeants n'évoquait les querelles territoriales empoisonnant les relations bilatérales.

Et ce alors même que cette rencontre intervient quelques mois seulement après une escalade des tensions dans la zone frontalière du Doklam, située sur le flanc ouest du Bhoutan, où les armées chinoises et indiennes se sont confrontées plus de deux mois l'été dernier.

L'Inde y avait envoyé des troupes pour empêcher la construction d'une route militaire par la Chine. Les deux parties sont finalement convenues d'un désengagement fin août.

- "L'ombre de 1962" -

Les deux pays ont une longue histoire de rapports teintés de méfiance pour conquérir la suprématie régionale: Pékin s'est rapproché du Pakistan ces dernières années, tandis que l'Inde met l'accent sur sa coopération avec les Etats-Unis.

New Delhi s'alarme par ailleurs du vaste projet chinois d'infrastructures des "Routes de la Soie" à travers l'Asie. Celui-ci inclut un vaste corridor économique passant par le Cachemire, dont l'Inde dispute la souveraineté au Pakistan.

Certes, la diplomatie chinoise a assuré que la réunion de Wuhan, organisée discrètement, serait le cadre "d'échanges en profondeur sur des sujets majeurs de préoccupation commune".

Mais pour Harsh Pant, professeur du King's College à Londres, il s'agit surtout "d'une tentative bien intentionnée de New Delhi en direction de Pékin pour voir s'il est possible de faire abstraction du passé pour relancer la relation bilatérale".

Si les deux puissances se disent engagées à régler leurs différends par la négociation, les avancées sont maigres.

L'Inde et la Chine restent notamment en vif désaccord sur le tracé de leurs frontières dans l'Arunachal Pradesh, un Etat intégré au territoire indien à l'époque de la colonisation britannique mais dont la Chine revendique âprement la souveraineté.

L'Inde a été humiliée par la Chine lors d'une courte mais sanglante guerre en 1962 à propos de cet Etat, sur lequel New Delhi garde la tutelle depuis le retrait des troupes chinoises après la fin du conflit.

"Il faut absolument que nous sortions de l'ombre de la guerre sino-indienne de 1962", réagit Wang Dehua, expert de l'Académie des sciences sociales de Shanghai.

"Cette rencontre se concentrera sur les façons d'éviter que se reproduise l'épisode navrant du Doklam l'an dernier", estime-t-il.

Mais M. Pant y voit également pour Narendra Modi une nécessité pragmatique avant des élections nationales en Inde l'an prochain: difficile de s'y représenter avec pour bilan une relation en lambeaux avec le puissant voisin chinois, deuxième économie mondiale.

Et à l'heure où Pékin est menacé de guerre commerciale par les Etats-Unis, les deux pays pourraient trouver un terrain d'entente sur cette question, juge l'universitaire.

Avec AFP