C'est une autre facette du débat brûlant sur la crise de réfugiés en Europe : leur afflux plombera-t-il une économie encore convalescente ou dynamisera-t-il l'activité en renouvelant une population active vieillissante ?
Dans un rapport publié mercredi 20 janvier, les experts du Fonds monétaire international (FMI) apportent des éléments de réponse en plaidant pour une intégration "rapide" des migrants au marché du travail, sans toutefois nier l'ampleur de la tâche.
"Avec un taux de chômage élevé dans plusieurs pays européens, l'intégration des réfugiés (...) pourrait prendre plus de temps qu'ailleurs", prévient ce rapport qui doit être officiellement présenté mercredi par la patronne du FMI, Christine Lagarde, au Forum de Davos.
La question est pressante : plus d'un million de demandeurs d'asile, dont près de la moitié de Syriens, sont arrivés en Europe en 2015 et le flot ne se tarit pas malgré l'arrivée de l'hiver.
Impact mitigé à court terme
A court terme, cette vague migratoire sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale aura un impact mitigé, selon le FMI : les dépenses publiques liées à l'accueil des réfugiés se traduiront mécaniquement par une "modeste" accélération de la croissance économique mais elles pèseront également sur les finances des Etats.
Cette année, ce coût devrait être minime pour la France (0,06 % du PIB mais plus conséquent pour l'Autriche (0,31%) et pour l'Allemagne (0,35%), principal pays d'accueil en Europe, selon les calculs de l'institution.
Etrangement, le Fonds ne livre pas d'estimation pour la Grèce, qui voit pourtant les migrants affluer sur ses côtes et doit par ailleurs respecter de stricts objectifs budgétaires fixés par ses bailleurs de fonds internationaux.
A moyen terme, l'impact économique de cette vague migratoire dépendra "grandement" de la capacité des réfugiés à trouver un travail et à payer des impôts et des charges sociales, martèle le FMI.
La formation et l'éducation en question
En présentant mardi ses prévisions économiques mondiales, l'institution avait fait sonner une note plutôt sombre en évoquant un "grave problème" pour la capacité d'absorption des marchés du travail en Europe.
Son rapport se montre plus optimiste en jugeant "possible" que les nouveaux venus en Europe soient mieux formés et éduqués que leurs prédécesseurs issus des mêmes pays.
Un cinquième des réfugiés syriens arrivés entre 2013 et 2014 en Allemagne auraient ainsi suivi des études supérieures, un taux très proche de celui de leur pays d'accueil.
Mais les obstacles ne manquent pas : la barrière de la langue, les problèmes d'équivalence de diplômes mais aussi l'interdiction faite aux demandeurs d'asile de travailler pendant l'examen de leur dossier.
Le FMI préconise de "minimiser" ces restrictions et avance même l'idée, politiquement risquée, de lever "temporairement" l'obligation faite aux employeurs de verser le salaire minimum quand ils emploient des demandeurs d'asile.
Cette option doit être "étudiée avec soin" au regard du risque de créer des "dualités sur le marché du travail" qu'il pourrait ensuite être "difficile" de supprimer, reconnaît d'ailleurs le FMI.
Jugement réservé
Elle pourrait également nourrir un ressentiment vis-à-vis des réfugiés, en en faisant des "concurrents" sur le marché du travail, souligne le rapport qui assure par ailleurs qu'un afflux de migrants peu qualifiés pourrait "nuire" aux travailleurs du bas de l'échelle.
L'insertion professionnelle des réfugiés est pourtant cruciale pour qu'ils contribuent à l'impôt et réduisent l'ardoise à payer par les pays d'accueil, tout en limitant le risque "d'exclusion sociale", note le FMI.
En se fondant sur des précédents historiques, le rapport affirme que l'immigration produit généralement un "léger" impact positif sur les finances des pays d'accueil mais réserve son jugement sur les effets de la vague actuelle.
"Il y a une incertitude considérable sur le nombre à venir et l'origine des prochains réfugiés, sur la proportion qui seront autorisés (et voudront) s'installer à long terme, et sur leur succès dans l'intégration du marché du travail", note le Fonds.
Avec AFP