L'idée, poussée par le président français Emmanuel Macron, est de lancer la procédure d'asile en Afrique, "dans des zones identifiées, pleinement sûres, au Niger et au Tchad, sous supervision du HCR" (Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés).
Une feuille de route a été adoptée à l'issue de ce sommet en reprenant cette idée de réinstallation, mais chaque pays a mis en avant ses propres préoccupations dans un dossier source de tensions.
Les discussions ont réuni les présidents tchadien et nigérien, Idriss Deby Itno et Mahamadou Issoufou, ainsi que le chef du gouvernement d'entente nationale libyen, Fayez al-Sarraj, dont les pays sont au cœur du transit de migrants d'Afrique et du Moyen-Orient vers les côtes européennes.
Pour l'Europe, étaient présents la chancelière allemande Angela Merkel, les chefs de gouvernement italien et espagnol, Paolo Gentiloni et Mariano Rajoy, ainsi que la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini.
Une "mission conjointe" sera prochainement envoyée au Niger et au Tchad, souligne la déclaration finale, en promettant de "continuer à soutenir" ces pays sur plusieurs plans: contrôle des frontières, lutte contre les réseaux de passeurs..
Les Africains veulent du concret
Face à ces objectifs, les invités africains ont rappelé que la question de l'immigration "ne serait résolue que par le développement".
"On est habitué à des annonces de nos partenaires depuis des années. Nous voulons des choses concrètes", a insisté le président tchadien Idriss Deby.
Dans la déclaration finale, les Européens "reconnaissent qu'il est nécessaire" qu'ils "augmentent leur aide au Niger et au Tchad".
"Le problème, c'est la pauvreté", a admis Federica Mogherini. Mais "il n'y a pas besoin d'inventer un nouveau plan Marshall".
En 2015, lors du sommet sur la migration à La Valette (Malte), l'UE avait mis sur la table 1,8 milliard d'euros via un fonds pour les pays africains. Et l'UE a versé en juillet une aide de 10 millions d'euros au Niger pour lutter contre l'immigration clandestine, premier décaissement d'un programme décidé en 2016.
Les Européens cherchent de longue date comment couper les routes de l'immigration illégale transitant par la Méditerranée. Un accord controversé avec la Turquie, en 2016, à permis de réduire les flux en Grèce.
Mais d'autres routes migratoires commencent à reprendre, notamment du côté du Maroc et de l'Espagne, et la tragédie humanitaire continue, avec 14.000 morts en Méditerranée depuis 2014.
Sur le fond, la déclaration finale reprend la distinction réfugiés/migrants économiques martelée par le président français et la chancelière allemande.
"Les migrants irréguliers qui ne peuvent prétendre à aucune forme de protection internationale doivent être reconduits dans leur pays d'origine, dans la sécurité, l'ordre et la dignité, de préférence sur une base volontaire", souligne le texte.
M. Macron, soulignant la "pédagogie" que permettait cette distinction, a aussi plaidé pour "organiser le retour vers le pays d'origine" des migrants, via "des actions de coopération pays par pays".
Ce sommet intervient après une multiplication d'initiatives européennes en ordre dispersé pendant l'été -- notamment l'idée d'ouvrir des "hotspots" lancée par Emmanuel Macron, qui a inquiété les ONG, et a été vite corrigée par l'Elysée.
La déclaration rend en revanche hommage aux projets italiens, notamment en matière de coopération économique avec les communautés locales en Libye pour leurs donner des ressources autres que le trafic d'êtres humains.
L'Italie a aussi durci le ton avec un code de conduite pour les ONG -- que les chefs d'État et de gouvernement réunis lundi appuient sans réserve, jugeant qu'il permet "d'améliorer la coordination et l'efficacité des sauvetages".
En ce qui concerne la Libye, les Européens "félicitent des efforts déployés par le gouvernement d'entente nationale pour contrôler ses eaux territoriales" et soulignent l'importance "d'équiper et de former de manière adéquate les garde-côtes libyens", mais "en faisant porter l'accent sur la protection des droits de l'homme".
Avec AFP