Comme tant d'autres miliciens à l'époque, le quadragénaire passe pour avoir été un chef de guerre opportuniste et sans pitié à la tête de plusieurs rébellions tutsies pendant les deux guerres du Congo (1998-2003), conséquences directes du génocide au Rwanda.
Âgé de 44 ans, Bosco Ntaganda est l'un des cinq chefs de guerre congolais qui ont été jugés par la CPI instituée en 1998, quand l'ex-Zaïre basculait dans le chaos.
Son procès est intervenu juste après l'acquittement en appel du plus célèbre d'entre eux, Jean-Pierre Bemba, qui avait été condamné en première instance à 18 ans de prison pour des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité commis par ses troupes en Centrafrique).
Grand, réputé imbu de lui-même et connu pour avoir la "gâchette facile", même s'il réfute le surnom de Terminator et se présente comme un "être humain", M. Ntaganda était accusé d'avoir joué un rôle central dans les crimes commis en 2002 et 2003 dans la province de l'Ituri (nord-est).
Il devait répondre de 13 crimes de guerre et de cinq crimes contre l'humanité, pour lesquels il a plaidé non coupable. Il est accusé d'avoir commandité des meurtres, pillages et viols commis par ses troupes, dont des enfants-soldats.
- "Révolutionnaire" -
Ces crimes ont été commis par les Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), milice dont il était le chef militaire avant de rejoindre l'armée régulière.
"Je suis un révolutionnaire, mais je ne suis pas un criminel. Je suis en paix avec moi-même", a déclaré Bosco Ntaganda pendant son procès, costume sombre et à moustache en trait de crayon dans le box des accusés à La Haye.
En prison, il s'est comporté comme un détenu modèle: activités physiques, cours d'anglais, et même initiation au piano, selon son avocat, Stéphane Bourgon, en 2015.
Issu d'une famille tutsie de six enfants, Bosco Ntaganda est né en 1973 au Rwanda, qu'il a quitté dans le milieu des années 1980 pour la province du Nord-Kivu où vit une importante communauté rwandophone.
Non diplômé, sans expérience autre que militaire, il fait ses premières armes avec le Front patriotique rwandais (FPR) de Paul Kagame: il participe au Rwanda aux combats qui mettront fin au génocide des Tutsis par les Hutus en 1994.
Deux ans plus tard, en RDC, il soutient la rébellion de Laurent-Désiré Kabila qui mettra fin en 1997 à la longue dictature de Mobutu Sese Seko.
Chef d'état-major des FPLC, M. Ntaganda combat plus tard en Ituri, où un conflit entre Héma éleveurs - proches des Tutsis - et Lendu cultivateurs a fait 50 à 60.000 morts entre 1999 et 2003, jusqu'à l'intervention de la force européenne Artémis.
Les crimes qui lui sont alors attribués lui valent en 2006 un premier mandat d'arrêt de la CPI, resté secret. En 2008, la Cour révèle l'existence de son mandat dans le but de faire pression sur les autorités congolaises pour qu'elles arrêtent M. Ntaganda.
- Dissidence -
Celui-ci est alors chef d'état-major général de la branche armée du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), un autre groupe tutsi. Entré en dissidence, il contribue à la chute, début 2009, de Laurent Nkunda, chef charismatique du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD, également un groupe tutsi) au Kivu.
Il négocie avec Kinshasa l'intégration du CNDP au sein des forces armées gouvernementales. Chargé de superviser cette opération, Ntaganda rallie l'armée nationale avec le grade de général, et est nommé commandant en second des opérations au Kivu.
Selon diverses ONG et des rapports internationaux, il profite de ses fonctions pour s'enrichir à l'aide de divers trafics, notamment de minerais, dont regorge la région.
En mars 2012, la CPI condamne à 14 ans de prison Thomas Lubanga, ancien chef de M. Ntaganda dans les FPLC, pour l'enrôlement d'enfants soldats durant la guerre civile en Ituri.
Sentant faiblir la détermination de Kinshasa à le protéger des poursuites du tribunal de La Haye, le général Ntaganda fait défection de l'armée le mois suivant avec des dizaines d'anciens du CNDP.
Ces désertions contribueront à la naissance du M23, qui sévira au Nord-Kivu 18 mois durant avant d'être vaincu en novembre 2013. Mais pour M. Ntaganda, visé en juillet 2012 par un nouveau mandant de la CPI, l'aventure cessera plus tôt.
A la suite de dissensions accompagnées de combats au sein du mouvement, il est contraint à fuir au Rwanda, et à se réfugier à l'ambassade des États-Unis à Kigali, d'où il demandera son transfert à la CPI.
Avec AFP