L'intervention des forces de l'ordre a fait plusieurs blessés dans la foule, selon la même source.
"Plusieurs personnes ont été frappées et blessées", a déploré auprès de l'AFP Daniel Molokele, le porte-parole du Mouvement pour un changement démocratique (MDC), le principal parti d'opposition au Zimbabwe. "Nous condamnons, dans les termes les plus fermes, la brutalité de la police".
S'étant vu interdire par les autorités de se réunir sur une des places de la capitale, plusieurs centaines de sympathisants du MDC s'étaient rassemblés mercredi matin devant le siège du parti pour écouter un discours de leur chef, Nelson Chamisa, sur l'état du pays, englué dans une crise économique catastrophique.
D'importants effectifs de police, munis de deux canons à eau, ont alors encerclé la foule, puis l'ont dispersée sans ménagement dans les rues alentour, empêchant M. Chamisa de s'adresser à ses partisans.
"Ils veulent que les gens fassent quoi ?", s'est indignée une vendeuse du quartier, Sabina Muchemwa. "La situation est vraiment dure et le gouvernement ne fait rien pour l'alléger. Pourquoi ils empêchent Chamisa de parler ?".
Huit persones, parmi lesquelles de simples badauds, ont été arrêtés, dont une mère de famille qui portait un bébé de dix mois dans son dos, selon l'association des Avocats du Zimbabwe pour les droits de l'homme (ZLHR).
"Le bébé est actuellement détenu au poste de police central d'Harare, avec sa mère qui a été victime d'une arrestation arbitraire", ont-ils dénoncé.
S'exprimant à son tour devant quelques membres de son parti, Nelson Chamisa a prédit la chute prochaine du régime.
"Si la police se comporte de la façon que vous avez vue, ça signifie que la fin est proche, peut-être même avant Noël", a déclaré le dirigeant. "La brutalité et la répression ne sont pas soutenables, elles ne peuvent pas durer éternellement".
- "La fin est proche" -
"Quand vous voyez un régime (...) qui a peur de son propre peuple, vous savez que la fin est proche", a-t-il insisté.
Au pouvoir depuis la fin 2017, le président Emmerson Mnangagwa a hérité de son prédécesseur Robert Mugabe, qui a régné sans partage pendant trente-sept ans, d'un pays financièrement exsangue.
La situation de ses 15 millions d'habitants s'est encore aggravée récemment avec le retour de l'hyperinflation, des coupures d'électricité, des pénuries de produits comme la farine, le carburant et les médicaments, et la sécheresse.
L'opposition et la société civile l'accusent de réprimer systématiquement leurs manifestations contre la dégradation continue de leurs conditions de vie.
"En matière de dictature, Mugabe ressemble maintenant à un enfant de chœur", a estimé mercredi M. Chamisa.
Depuis les émeutes causées en janvier par la hausse des prix des carburants, les ONG ont recensé une cinquantaine de cas d'enlèvements ou de tortures et des centaines d'arrestations d'opposants, de syndicalistes ou de membres de la société civile.
Mercredi, un tribunal a abandonné les poursuites engagées contre le pasteur proche de l'opposition Ewan Mawarire et le syndicaliste Peter Mutasa, qui avaient appelé aux manifestations contre les prix du carburant en janvier.
"C'était une parodie de justice. Ils savaient bien que leur dossier était vide", a commenté à l'AFP M. Mawarire. "Cette décision de non-lieu aujourd'hui n'est pas le produit de leur bienfaisance, mais de notre ténacité et de celles de nos avocats".