M. Djotodia, unique et éphémère chef de l'Etat musulman de l'histoire de la Centrafrique, ravagé par la guerre civile depuis 2013 même si les violences sont devenues plus sporadiques, a atterri à Bangui dans la matinée à bord d'un vol de Royal Air Maroc en provenance de Casablanca via Douala au Cameroun.
Un journaliste de l'AFP l'a vu à son arrivée dans un hôtel de Bangui, acclamé par une trentaine de ses partisans.
En les saluant, il était suivi de près par des officiers de l'armée et de la police centrafricaines chargés de sa protection.
M. Djotodia doit être reçu à la mi-journée par le chef de l'Etat Faustin-Archange Touadéra, élu en 2016, selon son entourage.
"2020 sera une année de paix, je ne suis plus un homme de guerre, je suis un homme de paix", a lancé M. Djotodia aux journalistes.
- "pacifier le pays" -
"J'appelle tous les rebelles à patienter. Il y a un accord de paix qui a été signé. Il est temps que nous tous, combattants et tous les Centrafricains, on se lève pour pacifier le pays", a-t-il ajouté dans un court entretien avec l'AFP.
Le 6 février 2019 à Khartoum, un accord de paix a été signé entre le gouvernement et 14 groupes armés, mais aussi entre ces groupes eux-mêmes.
Depuis, les combats ont baissé mais n'ont pas réellement cessé. La guerre civile persiste sous la forme d'accès de violence plus sporadiques entre groupes rebelles, qui contrôlent plus des deux tiers de la Centrafrique. Ces combats continuent de faire de nombreuses victimes parmi les civils.
Près d'un quart des quelque 4,7 millions d'habitants de ce pays parmi les plus pauvres du monde ont fui leurs domiciles depuis 2013.
A 71 ans, Michel Am-Nondroko Djotodia revient donc au pays après six années d'exil au Bénin et 24 jours après le retour à Bangui de François Bozizé, le président qu'il avait renversé par les armes avant de s'autoproclamer chef de l'Etat le 24 mars 2013.
M. Djotodia était alors à la tête de la rébellion de la Séléka, dominée par la communauté musulmane, un mouvement qu'il avait fondé et dissout le mois suivant sa prise du pouvoir, mais qui a continué à combattre des groupes d'auto-défense appelés anti-balakas, à majorité chrétienne.
Manifestement rapidement dépassé par ses combattants et par les affrontements très meurtriers pour les civils, cet homme plutôt discret, qui répétait alors qu'il n'avait "pas envie de se maintenir au pouvoir", a été contraint de démissionner le 10 janvier 2014 avant de fuir au Bénin, après une intervention de l'armée française dans une opération baptisée Sangaris, sous couvert d'une résolution de l'ONU, pour mettre fin aux tueries.
Considérablement affaiblie par Sangaris et la force multinationale africaine MISCA, l'ex-Séléka avait dû se retirer de Bangui début 2014, s'était repliée sur ses fiefs du nord du pays et s'était divisée, disséminant ses forces en une multitude de groupes armés rebelles.
- Après le retour de Bozizé -
Michel Djotodia, qui a vécu auparavant de longues années à l'étranger, en particulier en URSS, était aussi l'un des principaux fondateurs puis chef de la rébellion de l'Union des Forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), mouvement à l'origine de la première guerre civile centrafricaine, de 2004 à 2008, sous la présidence de Bozizé, lequel avait lui-même pris le pouvoir par un coup d'Etat en 2003.
Le 16 décembre dernier justement, M. Bozizé a effectué à Bangui un retour d'abord en catimini, puis triomphal six jours plus tard, acclamé par des milliers de partisans dans la capitale et dont les slogans l'incitaient à "prendre le pouvoir".
Il est toujours sous le coup d'un mandat d'arrêt international lancé par la Centrafrique en 2013 pour "crimes contre l'humanité et incitation au génocide" et également sous sanction des Nations unies pour son rôle dans les sanglants affrontements de 2013.
M. Bozizé est rentré juste à temps pour pouvoir déposer une candidature à l'élection présidentielle prévue fin 2020, mais est resté vague sur ses intentions. Rien n'a filtré pour l'heure sur celles de M. Djotodia.
Avec AFP