Le 46ème président des Etats-Unis abordait ce discours, très attendu, "avec le vent dans le dos", conforté par la contre-offensive ukrainienne et de récents succès législatifs chez lui, avait déjà dit son conseiller à la sécurité nationale Jake Sullivan.
L'annonce mercredi matin du président russe Vladimir Poutine sur une mobilisation partielle et sa menace d'utiliser l'arme nucléaire n'ont fait que conforter Joe Biden - dont les plumes n'ont eu à faire que de légères retouches au discours pour tenir compte de ces derniers événements, fait-on savoir à la Maison Blanche.
Le président américain a accusé la Russie d'avoir "violé de manière éhontée" les principes fondateurs de la Charte des Nations unies.
"Cette guerre anéantit le droit de l'Ukraine à exister, tout simplement", a-t-il poursuivi, et cela devrait "glacer le sang" de tout un chacun.
"La charte des Nations unies n'a pas été signée que par des démocraties", a-t-il noté, en appelant tous les pays à se joindre à sa condamnation des "ambitions impérialistes".
- "Inclusive" -
Le président américain en appelle par là aux nombreux Etats émergents et en développement qui ont refusé de s'aligner sans conditions sur la condamnation occidentale de la guerre en Ukraine - et dont certains, comme la Turquie et l'Inde, ont commencé à prendre leurs distances avec Vladimir Poutine.
Joe Biden a aussi estimé que les Nations unies devaient devenir une organisation plus "inclusive" et plaidé pour une réforme majeure du Conseil de sécurité, cet organe souvent paralysé par le droit de veto, qui compte pour l'heure cinq membres permanents: Etats-Unis, Russie, France, Royaume-Uni et Chine.
En appelant à confier des sièges permanents à des pays d'Afrique et d'Amérique latine, il "a voulu montrer que les Etats-Unis étaient à l'écoute", analyse Garret Martin, professeur de relations internationales à l'American University.
Le président américain a aussi insisté sur les engagements multilatéraux des Etats-Unis à travers le monde, et sur leurs efforts en matière de sécurité alimentaire, de santé, de climat...
S'il a répété que sa vision du monde "était enracinée dans les valeurs de la démocratie", Joe Biden n'a pas tout à fait repris mercredi la critique ouverte qu'il avait lancée en 2021 contre les régimes "autoritaires."
"Il y avait un côté un peu pragmatique" dans son approche, indique Garret Martin. "On l'avait déjà vu dans sa démarche d'aller rendre visite (en juillet au prince héritier d'Arabie Saoudite) Mohammed ben Salmane, c'est assez cohérent."
Cette entrevue avait été vivement critiquée par les militants des droits humains.
- "Guerre froide" -
Mais Joe Biden n'en a pas pour autant oublié sa grande priorité stratégique: positionner au mieux les Etats-Unis dans leur rivalité avec la Chine - dont il a cité le nom, ce qu'il n'avait pas fait l'an dernier.
Bien sûr, il a répété ne pas vouloir de "conflit" ni de "Guerre froide" avec Pékin, et maintenu que les Etats-Unis n'avaient pas modifié leur politique concernant Taïwan - après de récents propos ayant jeté le doute sur ce sujet.
"L'accent mis sur la Russie ne signale en aucun cas une moindre préoccupation des Etats-Unis envers la Chine", explique Robert Daly, expert du Wilson Center, pour qui toutes les critiques adressées par Joe Biden à Moscou "déteignent sur Pékin."
L'expert souligne par ailleurs que la Chine est opposée pour sa part à une réforme du Conseil de sécurité.
"La Chine mène un développement nucléaire militaire sans précédent et inquiétant sans aucune transparence", a dénoncé Joe Biden. Il a aussi fustigé les violations des droits humains dans le Xinjiang et condamné les "projets d'infrastructure qui génèrent d'énormes dettes sans déboucher sur les avantages promis", dans une allusion transparente aux lourds investissements chinois partout dans le monde.
Joe Biden, très attaché au principe de la prédominance américaine dans le monde, a clairement exprimé que "les Etats-Unis mèneraient la défense (de l'ordre international) en coopération avec toutes les nations de bonne volonté", résume Robert Daly.