Pretoria a invoqué vendredi devant la justice sud-africaine l'immunité diplomatique du président soudanais Omar el-Béchir, inculpé par la Cour pénale internationale (CPI), pour justifier son refus de ne pas l'avoir arrêté en 2015, une affaire qui avait provoqué une vive polémique.
Le dirigeant soudanais est, depuis 2009, sous le coup d'un mandat d'arrêt de la CPI pour crimes contre l'humanité, crimes de guerre et génocide dans le conflit au Darfour (ouest du Soudan) qui a fait plus de 300.000 morts.
En juin 2015, alors qu'Omar el-Béchir participait en Afrique du Sud à un sommet de l'Union africaine (UA), un tribunal de Pretoria lui avait interdit de quitter le territoire, dans l'attente d'un jugement définitif. Mais le gouvernement sud-africain avait laissé le président soudanais reprendre son avion, qui plus est depuis une base militaire.
L'Etat sud-africain avait néanmoins fait appel de la décision de justice qui lui avait ordonné d'arrêter Omar el-Béchir. Un appel, rejeté en septembre par la justice.
Mécontent, le ministère sud-africain de la Justice avait alors saisi la Cour suprême d'appel.
Lors de l'audience vendredi à Bloemfontein (centre), Pretoria a fait valoir qu'Omar el-Béchir ne pouvait pas être arrêté, conformément à la législation sud-africaine sur l'immunité diplomatique. "Qu'il s'agisse d'un génocide ou d'une simple contravention, la section 4 de la loi sur l'immunité diplomatique accorde l'immunité à un chef de l'Etat tant qu'il est en exercice", a affirmé Jeremy Gauntlett, l'avocat représentant le ministère de la Justice.
Omar el-Béchir "bénéficiait-il d'une immunité en vertu de la loi sud-africaine quand il est venu en juin ?", a réagi l'accusation. "La réponse est simple et on la trouve" dans le Traité de Rome instituant la CPI, a estimé Wim Trengove représentant l'organisation sud-africaine SALC qui avait obtenu de la justice de faire arrêter le président soudanais.
Selon l'avocat, un dirigeant en exercice ne peut pas profiter de sa fonction pour échapper à la CPI. "C'est absolument clair et sans ambiguïté", a-t-il estimé.
L'audience doit durer la journée de vendredi à la Cour suprême d'appel, qui devrait se prononcer ultérieurement sur la recevabilité ou non de sa saisine par l'Etat.
Ce dernier épisode judiciaire sur l'affaire Béchir intervient alors que les dirigeants africains envisagent de se retirer de la CPI, accusée de "s'acharner beaucoup plus sur l'Afrique, sur les chefs d'Etats africains, y compris des chefs d'Etat en exercice" que sur le reste du monde, selon les termes du président tchadien Idriss Deby, président en exercice de l'UA.
AFP