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Au Burkina, la renaissance d'un camp de réfugiés maliens


Des réfugiés maliens écoutent le ministre des Affaires étrangères du Burkina Faso lors de sa visite au camp de réfugiés de Goudebou près de Dori, au nord-est du Burkina Faso, le 11 mars 2021.
Des réfugiés maliens écoutent le ministre des Affaires étrangères du Burkina Faso lors de sa visite au camp de réfugiés de Goudebou près de Dori, au nord-est du Burkina Faso, le 11 mars 2021.

Plus de 5.000 réfugiés sont déjà installés dans le camp de Goudebou.

"Je suis heureux, c’est comme si je revenais chez moi", lance Ousmane Wanaher, un réfugié malien de 34 ans, en regagnant le camp de Goudebou, dans le Nord-Est du Burkina Faso, un an après l’avoir fui sous la menace des attaques jihadistes.

En mars 2020, après une nouvelle attaque contre le poste de sécurité de ce camp situé près de Dori et qui abritait jusqu'à 9.000 réfugiés, ceux qui étaient restés après les précédentes attaques avaient dû fuir à leur tour, occasionnant la fermeture de fait de Goudebou.

Le camp de Mentao, dans la même région proche de la frontière malienne, s’était également vidé, son accès ayant été coupé durant plus d’un an, entravant les ravitaillements.

Depuis 2012, plusieurs milliers de personnes avaient trouvé refuge à Goudebou et Mentao, fuyant les exactions des groupes jihadistes dans le Nord et le centre du Mali.

Mossa Ag Malokia, un réfugié malien depuis 2012 au Burkina était dans un camp à Djibo. Il est nouvellement installé ici. "Au début tout se passait bien mais il fut un moment où c’était très compliqué. Les gens ont été menacés de quitter le camp. On était obligé d’aller à Dori. Après on nous a relocalisé pour venir ici", affirme le réfugié à VOA Afrique.

Le Burkina Faso, jadis havre de paix, est devenu à son tour la cible d'attaques jihadistes depuis 2015. Des attaques qui ont fait plus de 1.200 morts et contraint un million de personnes à fuir leurs foyers, notamment dans la périlleuse zone des trois frontières entre Burkina, Mali et Niger où opèrent des groupes liés à Al-Qaida ou à l'Etat islamique.

Après avoir fui le Mali puis les camps d’accueil au Burkina l'an dernier, les réfugiés maliens étaient restés coincés dans le Sahel burkinabé. Un millier d’entre eux ont alors fait le choix de rentrer au Mali, bien que le pays soit toujours en proie à l’instabilité, le reste fuyant vers les villes du Nord du Burkina dans des conditions de vie précaires.

Depuis décembre, les autorités burkinabé et le Haut commissariat pour les réfugiés de l'ONU (HCR), organisent des convois pour ramener les réfugiés, plusieurs centaines d'autres étant revenus par leurs propres moyens.

Aidara cheick El Kabir, un autre réfugié malien fait partie des réfugiés relocalisés. "Il y a des abris, y a l’eau, ils sont en train de faire les latrines et les douches, ce n’est pas encore terminé mais ça promet. On sait qu’on ne peut pas tout faire tout de suite. C’est au fur et à mesure", indique ce réfugié.

"Il y a à présent un changement. Il y a des abris, beaucoup d’infrastructures dont l’école et le dispensaire qui ont rouvert. Il y a surtout la sécurité, car c’est le point le plus important pour faire revivre ce camp", a affirmé le ministre burkinabè des Affaires étrangères Alpha Barry en visitant le camp le 11 mars.

"Actuellement, on se sent en sécurité parce qu’on voit les forces de sécurité qui patrouillent. On voit même des petits avions qui volent au dessus du camp", se réjouit Moussa Ag Maloka, un réfugié malien qui avait quitté le camp.

La sécurité a été renforcée à Goudebou et alentour avec davantage de personnel et plus de patrouilles qui assurent aussi la protection des communautés locales, selon les autorités burkinabè.

A terme, une caserne d'unités mixtes de militaires, gendarmes et policiers sera construite à Goudebou, affirme une source sécuritaire.

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Retour au Mali risqué

"Quand nous avons quitté Goudebou, nous avons tous eu des difficultés pour trouver des abris et accéder aux services essentiels. Nous n’avions pas de ressources pour louer des maisons et c’était toujours risqué de rentrer au Mali", explique Ousmane Wanaher, assis sous l'une des 2.000 tentes du camp complètement réaménagé sur près de 200 hectares.

Entre décembre et mars, près de 8.000 personnes venant de villes du Nord du Burkina ont été accueillies à Goudebou, selon le représentant par intérim du HCR, Shelubale Paul Ali-Pauni.

"Notre souci et celui du gouvernement est de protéger les réfugiés, de les rassembler là où ils auront une meilleure sécurité", explique-t-il.

"Le défi pour nous c’est de regrouper l’ensemble des 20.000 réfugiés qui sont dans le Sahel burkinabé sur un seul site", a précisé le ministre Alpha Barry, soulignant que des démarches sont entreprises pour ramener à Goudebou tous les autres réfugiés vivant hors du camp.

"C’est une renaissance ici, car ce ne sont pas seulement les réfugiés qui avaient fui. Les autochtones aussi avaient fui. Aujourd’hui, les réfugiés reviennent et nous avec eux", explique Halidou Diallo, représentant de la communauté hôte, qui bénéficie des mêmes services que les réfugiés.

"Nous sommes logés dans des abris bien faits et spacieux, avec des points d’eau accessibles, un centre de santé et une école primaire", affirme Cheik Haidara, un quinquagénaire, chef d’une famille de huit personnes, qui a fui le Mali en 2012.

En attendant l’ouverture prochaine d’une crèche pour pour y envoyer ses deux derniers fils de trois ans, il n’a qu’un rêve: "voir ma fille réussir son examen de fin d’année", après avoir terminé première de la classe de CM2 de l’école de Goudebou qui accueille 1.166 élèves.

Les autorités burkinabè et leurs partenaires pour ce projet de relocalisation de ces réfugiés ont misé sur des infrastructures sociales. Les enfants du camp ont accès à l’école. Seuls les enseignants ont des difficultés liées à la situation sécuritaire.

"La situation sécuritaire ne joue pas sur la situation des élèves à partir du moment que les élèves eux-mêmes vivent dans le camp, c’est plutôt au niveau des enseignants. Nous vivons tous à Dori et tous les jours nous faisons des navettes. Quand nous venons au camp c’est avec la peur au ventre. Au retour c’est aussi la même situation. Quelques fois cela joue sur le moral", a affirmé Souleymane Konaté, directeur de l’école B de Goudebou.

La santé est gratuite dans le camp. Mais la charge de travail est grande pour les agents. "Tout est entièrement gratuit que ce soit les réfugiés ou les nationaux. La principale difficulté c’est la charge de travail vu que tout est gratuit. Un infirmier peut consulter 50 à 100 malades par jour", a dit Ibrahima Karambiri, médecin traitant, responsable du poste de santé de Goudebou.

Dans le cadre de cette relocalisation, plus de 5.000 réfugiés sont déjà installés dans le camp de Goudebou dont plus de 1.000 en provenance de Djibo. Le pays compte plus de 20.000 réfugiés essentiellement installés dans la région du Sahel.

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    Lamine Traoré

    Lamine Traoré est journaliste depuis près d’une dizaine d’années. Il a intégré Radio Oméga en 2013, la principale radio privée d’information au Burkina.

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