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Au stade Tata-Raphaël, les sportifs de Kinshasa entre inquiétude et incertitude


Les partisans du président Joseph Kabila lors d’un meeting au stade Tata Raphaël, à Kinshasa, RDC, 29 juillet 2016. (VOA/Top Congo - Photo d'illustration)
Les partisans du président Joseph Kabila lors d’un meeting au stade Tata Raphaël, à Kinshasa, RDC, 29 juillet 2016. (VOA/Top Congo - Photo d'illustration)

L'opposition au président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila, avait menacé de mettre le peuple dans la rue dès le lundi 19 décembre si le chef de l'État n'annonçait pas son départ au terme de son mandat, qui s'achève le lendemain.

Ils courent, boxent, jouent au foot au pied du vétuste stade Tata-Raphaël mais ils sont moins nombreux que d'habitude à leur rendez-vous matinal: comme beaucoup d'habitants de Kinshasa, les sportifs du dimanche vivent entre incertitude et inquiétude, à la veille d'un lundi redouté de tous.

Samedi, des négociations entre pouvoir et opposition ont été mises en suspens jusqu'à mercredi. M. Kabila entend rester au pouvoir au-delà du 20 décembre mais l'opposition n'a finalement pas appelé à manifester. Alors que se passera-t-il ce 19 décembre, dont tout le monde parle depuis des mois en RDC ?

Police et armée ont été déployées pour dissuader et prévenir d'éventuels troubles dans la tentaculaire et explosive capitale congolaise (10 millions d'habitants). Mais la population, déjà confrontée à de sanglantes émeutes, reste méfiante.

Autour du stade Tata-Raphaël, l'ancien stade du 20-Mai qui a accueilli en 1974 le célèbre combat de boxe "Rumble in the Jungle" entre Mohammed Ali et George Foreman, quelques centaines de jeunes hommes, et quelques femmes, ont conservé leurs habitudes dominicales.

Mais autour de Jean-Marie, alias "champion Mabanga", le cercle est plus restreint que d'habitude pour courir au rythme de ses slogans: "Ici, on ne vit que pour le ring !", "Qui t'as dit de venir ici ? Tu sais qu'ici, c'est dur"...

Pour le coach, c'est un jour comme un autre. Et lundi le sera aussi: "Il ne se passera rien", prédit-il, le visage ruisselant de sueur, sa veste de survêtement vert trempée par l'effort.

Tout le monde ne partage pas ses certitudes. "Habituellement, on est 700 ou 800. Aujourd'hui, on doit être moins de 250", remarque Michel Kabamba, "politologue" qui joue au foot un peu plus loin.

"Les militaires sillonnent la ville, ce qui crée un esprit de crainte. On ne sait pas ce que le peuple est en train de penser. Certains ont déjà fait des provisions, les étrangers ont quitté la RDC avec l'idée que le 19-20 décembre, le pays sera peut-être divisé. Dans l'esprit de beaucoup de Congolais, ce sera une journée de troubles", explique ce trentenaire, un maillot de la sélection nationale sur les épaules.

Rumeurs

Beaucoup de Kinois affirment qu'ils resteront chez eux lundi. "Tout le monde a peur parce que selon les rumeurs, la population va sortir. Moi, j'espère que ce sera une journée calme", confie Christian Mvuluzi, un boxeur au visage juvénile.

"On est moins nombreux au stade. Est-ce un signe de ce qui peut arriver demain ?" s'interroge toutefois cet étudiant en électricité au chômage: "Je ne sais qu'une chose, c'est que la Constitution dit que celui qui est en place doit partir. Mais je voudrais une solution dans la tranquillité".

Les 19 et 20 septembre, en marge d'une manifestation de l'opposition après l'officialisation du report de l'élection présidentielle qui devait avoir lieu cette année, une cinquantaine de personnes avaient été tuées dans des affrontements entre jeunes et forces de l'ordre à Kinshasa.

Émile Kasungo, lui, assure qu'il descendra dans la rue. "Nous sommes le peuple le plus pauvre de la planète mais parmi les pays les plus riches. Depuis 1960, le peuple n'a fait que souffrir", s'emporte cet homme de 39 ans.

"Il n'y a rien qui marche, on meurt de faim, 90% des gens sont au chômage", énumère-t-il, le regard survolté sous sa casquette. "99% !" rectifie un autre.

Pour lui, "c'est simple comme bonjour" : "un vrai Congolais doit être dans la rue !".

"Champion Mabanga" sortira lui aussi de chez lui, mais pas pour manifester: "Je serai ici. Au stade".

Avec AFP

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