"Les Etats-Unis entendent aboutir à une prolongation de cinq ans de New Start, comme le permet le traité", a déclaré la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki lors d'une conférence de presse au lendemain de l'entrée en fonctions du démocrate.
"Le président a toujours dit clairement que le traité New Start était dans l'intérêt de la sécurité nationale des Etats-Unis, et une telle extension est encore plus nécessaire quand les relations avec la Russie sont tendues comme maintenant", a-t-elle estimé.
Pour montrer qu'il ne s'agit pas d'un chèque en blanc, le président Biden a parallèlement demandé aux services de renseignement américains "un examen global" de la récente cyberattaque géante imputée aux Russes, d'éventuelles "ingérences" dans les dernières élections américaines et de "l'utilisation d'armes chimiques contre le leader de l'opposition Alexeï Navalny", a précisé Jen Psaki.
Cette analyse doit aussi concerner les informations, minimisées par l'ex-président républicain, selon lesquelles la Russie aurait payé des "primes" à des talibans pour tuer des soldats américains.
"Tout en travaillant avec la Russie pour défendre les intérêts américains" en matière de contrôle des armements, "nous travaillons aussi à tenir la Russie pour responsable de ses actes antagonistes et irréfléchis", a plaidé Jen Psaki.
Avant même de prêter serment, Joe Biden et son équipe avaient haussé le ton avec Moscou, désireux de rompre avec l'ambivalence de l'administration Trump, tiraillée entre une certaine fermeté et la volonté du milliardaire de se rapprocher du président russe Vladimir Poutine.
Critiques de l'ex-négociateur
Dès l'arrestation d'Alexeï Navalny dimanche dans la capitale russe, Jake Sullivan, qui n'était alors que le futur conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, avait appelé à sa libération "immédiate", qualifiant les "attaques" contre l'opposant d'"affront au peuple russe".
Et en décembre, le vainqueur de la présidentielle américaine s'était attiré les foudres des autorités russes pour avoir promis des représailles suite à la gigantesque cyberattaque qui a visé la première puissance mondiale des mois durant -- elle aussi minimisée par Donald Trump.
Malgré ces tensions, la proposition sur New Start devrait être accueillie favorablement par Vladimir Poutine, qui s'était lui aussi dit favorable à une extension de cinq ans.
L'administration Trump n'avait, elle, accepté qu'une prolongation conditionnelle d'un an, le temps de négocier un accord plus global, mais les pourparlers avec Moscou n'avaient pas abouti.
Ce traité, le dernier accord du genre entre les deux anciens rivaux de la Guerre froide, limite les arsenaux des deux puissances nucléaires à un maximum de 1.550 ogives déployées chacun, soit une réduction de près de 30% par rapport à la limite précédente fixée en 2002. Il limite aussi le nombre de lanceurs et bombardiers lourds à 800, ce qui reste suffisant pour détruire la Terre plusieurs fois.
Le négociateur américain sous l'administration Trump, Marshall Billingslea, a immédiatement critiqué la position de la Maison Blanche.
"Il n'aura fallu que 24 heures à l'équipe Biden pour gâcher le rapport de forces favorable que nous avions avec la Russie", a-t-il tweeté. "Nous n'obtenons rien en échange de la prolongation", a-t-il déploré.
Les atermoiements de l'ex-gouvernement républicain avaient toutefois été dénoncés par les démocrates et de nombreux experts en armement. D'autant que Washington s'était déjà retiré avec fracas ces trois dernières années de l'accord sur le nucléaire iranien et du traité "Ciel Ouvert" de surveillance aérienne, tout en dénonçant l'important traité de désarmement russo-américain sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (INF).
Plusieurs spécialistes ont salué la nouvelle position américaine.
"Excellente nouvelle. New Start profite aux Etats-Unis, à la Russie et au monde", a tweeté Vipin Narang, professeur au Massachusetts Institute of Technology. "Ses seuls détracteurs sont ceux qui veulent une course aux armements sans limite."