"Nous observons depuis trois mois des harcèlements accentués des membres de l'opposition, alors que le gouvernement ne cesse de dire que tout va très bien dans le pays", a déclaré à l'AFP Anschaire Nikoyagize, président de la ligue Iteka, organisation membre de la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH).
Expliquant qu'Iteka continue de travailler clandestinement au Burundi, M. Nikoyagize soutient que son organisation a "enregistré 272 personnes arrêtées et 16 portées disparues en octobre, 295 arrêtées et 39 portées disparues en novembre, et 246 arrêtées et 16 disparues rien que pour les deux premières semaines de décembre".
Toutes ces personnes sont essentiellement accusées "de participation aux bandes armées", une inculpation qui fait référence à une appartenance à l'un des mouvements rebelles burundais nés de la contestation du troisième mandat du président Pierre Nkurunziza.
"Cette répression a créé une peur généralisée (...), parce que ces arrestations sont observées dans presque toutes les provinces du pays", a regretté M. Nikoyagize.
Ces informations sont confirmées par des sources des services de sécurité et des habitants des anciens quartiers contestataires de la capitale burundaise Bujumbura, qui parlent d'une "pression de tous les instants".
Selon ces sources, des perquisitions inopinées sont organisées par l'armée, la police et les services secrets, qui encerclent des quartiers entiers, interdisent les gens d'aller au travail ou de sortir sous peine d'être alors arrêtés et accusés de graves infractions.
De même, tout chef de ménage au Burundi doit aujourd'hui tenir un "cahier de ménage" où sont consignés tous ceux qui habitent sa maison, leurs allées et venues ainsi que celles de ses visiteurs, même d'un soir, sous peine d'arrestation.
Interrogé par l'AFP au sujet des arrestations, le premier vice-président du Burundi, Gaston Sindimwo, a évoqué des "arrestations massives" de "perturbateurs", dont certains "en provenance des pays limitrophes".
"C'est pourquoi nous multiplions la vigilance et avons donné des injonctions pour qu'il y ait des fouilles, que toute personne suspecte soit arrêtée et interrogée", a-t-il souligné sans nommer les pays incriminés, alors que des sources sécuritaires évoquent une possible et imminente attaque rebelle d'envergure.
"Nous contrôlons tous les mouvements des personnes, et c'est pourquoi ces gens qui s'infiltrent sont arrêtés massivement, parce que justement, ils sont décelés par la population", a-t-il ajouté.
"Si vous voyez des gens qui sont arrêtés à gauche ou à droite, c'est sur base d'informations que nous détenons de la part de malfaiteurs arrêtés", a poursuivi M. Sindimwo, reconnaissant que "malheureusement, il peut y avoir des bavures".
Le Burundi est plongé dans une grave crise depuis l'annonce en avril 2015 de la candidature de Pierre Nkurunziza à un troisième mandat controversé et son élection en juillet de la même année. Les violences ont fait plus de 500 morts et poussé plus de 300.000 personnes à quitter le pays.
Avec AFP