Le Centre Robert F. Kennedy pour la justice et les droits humains a tenu, le 4 mai, à son siège ici à Washington, une table-ronde sur l’utilisation de la détention arbitraire au Cameroun.
Des ONG et de nombreux experts travaillant sur la question ont pris part à ce débat et le Franco-Camerounais Michel Thierry Atangana, figure emblématique de la détention arbitraire au Cameroun, a fait le déplacement pour participer aux discussions de la capitale fédérale américaine.
Arrêté sans mandat, le 12 mai 1997, par des agents des services de sécurité camerounais sous l’accusation de détournement des deniers publics, M. Atangana a été placé en détention solitaire à Yaoundé.
A l’issue d’un procès qui, de l’avis des experts, ne répondait pas aux normes internationales, il a été condamné à 15 ans de prison. Mais d’aucuns pensent qu’Atangana a ainsi payé son soutien à une figure de l’opposition qui projetait de se porter candidat contre le président Paul Biya.
Plusieurs personnalités camerounaises – anciens ministres, militants des droits de l’Homme, opposants – sont en prison ou y ont séjourné sous diverses accusations.
Le cas de M. Atangana avait retenu l’attention du Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire. Dans un avis rendu en novembre 2013, le Groupe a estimé que ses « 17 années de prison étaient arbitraires », a rappelé Sétondji Roland Adjovi, membre africain du Groupe.
Les participants à la table ronde du Centre Robert F. Kennedy ont lancé « L’appel de Washington » à l’attention des gouvernements camerounais et français pour qu’ils mettent en œuvre les recommandations des Nations unies concernant Michel Thierry Atangana. Celles-ci demandaient sa libération immédiate, une enquête pour identifier et punir les responsables de son emprisonnement, de même que «la réparation de tous les préjudices » qu’il a subis.
Lors d'un passage à la rédaction de VOA Afrique, M. Atangana a fait remarquer qu’il a été « libéré sur la base d’une remise de peine, qui n’a rien à voir avec le caractère arbitraire de la détention reconnu par les Nations unies. » Dans un tretien avec Timothée Donangmaye, il s’est insurgé contre « une instrumentalisation de la justice » au Cameroun sous le prétexte de la lutte contre la corruption. Selon lui, les hommes politiques africains « se tuent et tuent l’Afrique en menant des combats insipides, violents pour la quête du pouvoir. »
Exprimant sa déception que la France ait pratiquement ignoré son cas, M. Atangana a exprimé toute sa reconnaissance au gouvernement des Etats-Unis, à l’ambassade américaine à Yaoundé, à diverses O.N.G. et aux médias pour les efforts consentis en vue de maintenir l’attention sur sa détention arbitraire. L’ancien prisonnier a souligné la nécessité de sensibiliser la communauté internationale sur les activités du Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, et sur la nécessité de faire pression pour l’application des recommandations du Groupe.