"En supprimant le système de contre-pouvoirs nécessaires", les réformes proposées "ne respecteraient pas le modèle d'un système présidentiel démocratique fondé sur la séparation des pouvoirs", ont expliqué les experts en droit constitutionnel de la "Commission de Venise" de l'organisation paneuropéenne.
De ce fait, "le système risquerait de se transformer en un système présidentiel autoritaire", ont ajouté ces spécialistes, soulignant que chaque Etat a certes "le droit de choisir son propre système politique, qu'il soit présidentiel, parlementaire ou mixte", mais que ce droit "n'est pas sans condition".
Les experts européens s'inquiètent en particulier du fait qu'à l'avenir le chef de l'Etat turc pourrait "exercer le pouvoir exécutif seul", ce qui lui permettrait, "en l'absence de toute supervision, de nommer et démettre les ministres et l'ensemble des hauts fonctionnaires d'après des critères que lui seul aura fixés".
Le pouvoir qui serait donné au président de "dissoudre le Parlement pour quelque motif que ce soit" serait également "fondamentalement contraire aux systèmes présidentiels démocratiques", avertissent les experts.
Ils s'alarment également d'un projet qui pourrait "affaiblir encore le système déjà insuffisant de contrôle judiciaire de l'exécutif" ainsi que "l'indépendance de la justice".
Au-delà du fond de cette réforme, la Commission de Venise pointe également de "graves préoccupations d'ordre procédural", quant à la manière dont elle a été adoptée par le Parlement en janvier, et dont elle va être soumise au peuple.
Lors de l'adoption du texte au Parlement, "plusieurs députés du deuxième plus grand parti de l'opposition étaient en prison", s'étonnent les experts européens, en référence aux élus du Parti démocratique des peuples (HDP), la principale formation pro kurde en Turquie.
En outre, "les amendements n'ont pas été approuvés par un vote à bulletins secrets", ce qui "jette le doute sur le caractère authentique du soutien exprimé en faveur de la réforme", selon la Commission de Venise.
"L'état d'urgence actuel n'offre pas le cadre démocratique nécessaire à un scrutin aussi important qu'un référendum constitutionnel", tel que celui prévu le 16 avril, estiment enfin les experts.
Avec AFP