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Et maintenant, un Nobel pour Donald Trump et Kim Jong Un ?


Des spectateurs regardent la télévision à Seoul, Corée du Sud, le 12 juin 2018.
Des spectateurs regardent la télévision à Seoul, Corée du Sud, le 12 juin 2018.

Les avancées lors de leur sommet historique vaudront-elles un prix Nobel de la paix à Donald Trump et Kim Jong Un ? Envisageable mais prématuré, répondent les experts, qui rappellent que le Nobel n'est "pas un prix pour les saints".

Le président américain et le leader nord-coréen ont signé mardi à Singapour un document certes assez vague mais qui réaffirme l'engagement de Pyongyang à "une dénucléarisation complète de la péninsule coréenne", un développement que certains voudraient voir couronné par la prestigieuse récompense attribuée chaque année début octobre.

Mais, les spécialistes du Nobel restent prudents en raison du timing et de la personnalité des deux dirigeants, l'un ayant chamboulé la diplomatie internationale, en retirant par exemple les États-Unis de l'accord sur le nucléaire iranien, l'autre s'étant rendu coupable de nombreuses violations des droits de l'Homme.

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"C'est trop tôt", réagit Asle Sveen, historien du prix Nobel.

"Mais si ça devait déboucher sur un désarmement réel sur la péninsule coréenne, il serait très difficile de ne pas donner le prix. Ce serait une situation bizarre mais il s'est déjà produit que des personnes au passé assez violent reçoivent le prix Nobel de la paix", estime-t-il.

Avant même la rencontre de Singapour, plusieurs voix, y compris des personnalités en vue telles que le président sud-coréen Moon Jae-in, l'ex-président américain Jimmy Carter ou encore le chef de la diplomatie britannique Boris Johnson, affirmaient que Donald Trump pourrait mériter le Nobel.

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Si une candidature du président américain a été invalidée cette année, l'initiateur s'étant rendu coupable d'une usurpation d'identité pour procéder à cette nomination, 18 élus républicains l'ont proposé pour 2019 en reconnaissance de "son travail inlassable pour apporter la paix dans le monde".

Dix ans après avoir donné à Barack Obama un prix largement moqué car jugé prématuré, le comité Nobel devrait néanmoins veiller à éviter de répéter les erreurs du passé.

En 2000, le Nobel était allé au président sud-coréen d'alors, Kim Dae-jung, pour ses efforts de réconciliation avec le Nord, lesquels n'étaient pourtant guère plus qu'"une campagne de relations publiques", souligne Henrik Urdal, directeur de l'Institut de recherche pour la paix à Oslo (Prio).

"Je crois donc qu'on attendra certainement d'avoir des résultats assez significatifs pour redonner un prix dans cette direction", explique M. Urdal à l'AFP.

"Du sang sur les mains"

Si des progrès intervenaient effectivement sur le terrain dans la péninsule coréenne, le comité Nobel se retrouverait alors devant un dilemme cornélien, vu le passif des deux principaux protagonistes.

"Beaucoup de ceux qui ont reçu le prix de la paix avaient pas mal de sang sur les mains", souligne M. Urdal. "La question est de savoir si on a fait le bien suffisamment pour nettoyer ce sang. Ni Trump, ni Kim Jong Un n'ont suffisamment fait leurs preuves pour remporter le prix cette année".

Secrétaire du comité Nobel entre 1990 et 2014, Geir Lundestad avait coutume de dire que "le Nobel n'est pas un prix pour les saints".

"Ce n'est pas nécessaire de pousser cette logique jusqu'à l'extrême non plus", a-t-il dit mardi à l'AFP, heureux de la tenue du sommet mais sceptique sur la possibilité d'un Nobel à ce stade.

"Ces deux personnages ont d'énormes casseroles: Kim est un des pires dictateurs au monde et Donald Trump est aujourd'hui en train de détruire les structures politiques et économiques que les États-Unis ont mis en place après 1945 et qui profitent à tous", a-t-il fait valoir.

Et puis, il y a l'Iran.

"Ce qui plombe le plus la candidature de Trump, c'est qu'il a retiré les États-Unis de l'accord sur le nucléaire iranien", relève M. Urdal. "En même temps qu'il choisit la voie de la paix dans la péninsule coréenne, il attise un conflit au Moyen-Orient et met toute une région en danger".

Pour Peter Wallensteen, professeur suédois spécialisé dans les questions internationales, le président sud-coréen Moon Jae-in mériterait d'être inclus dans une éventuelle récompense: "En fait, Moon pourrait être celui qui la mérite le plus, mais ce serait une gifle pour Trump!"

Avec AFP

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