En République démocratique du Congo, l'Assemblée nationale a encore une fois prolongé lundi l'état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri, à la demande de l'exécutif. Cet exercice de routine - la 22e prorogation - a été fait sans la participation des élus de ces deux provinces.
Sortis de la salle en pleine séance plénière, les élus du Nord-Kivu et de l'Ituri ont déclaré qu'ils ne vont plus jamais participer aux activités parlementaires ayant trait avec la prorogation de l'état de siège dans leurs provinces.
"Les élus du Nord-Kivu et de l'Ituri ne siégeront que lorsque l'état de siège sera levé. Et donc, toutes les plénières relatives à la prorogation de l'état de siège ne vont plus concerner les élus du Nord-Kivu et de l'Ituri", a déclaré Tembos Yotama, député de la ville de Butembo, dans le Nord-Kivu.
Certaines organisations de la société civile sont d'accord avec les élus: l'état de siège qui est en vigueur depuis près d'une année n'a apporté aucune solution à l’épineuse question de l'insécurité.
"Pour nous, l'état de siège a été proclamé dans une précipitation qui ne dit pas son nom, car nous pensons qu'il devait être précédé par l'évaluation de tous les programmes de pacification qui se sont succédé", explique Thomas d'Aquin Muiti, vice-président honoraire de la Coordination provinciale de la Société civile du Nord-Kivu.
Le professeur Dady Saleh, analyste politique, abonde dans le même sens.
"Ça ne m'étonne en rien de voir que nous continuons à être en insécurité parce qu'on n'a pas fait assez", dit-il. "La forme de l'état de siège que nous avons, je ne sais même pas si c'est l'état de siège. Voulez-vous poursuivre quelque chose qui ne réussit pas sa mission et qui ne joue pas son vrai rôle ?", s'interroge-t-il.
Lors de son dernier passage à Goma, le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde a promis de rapporter au président Félix Tshisekedi toutes les propositions qu’il aura recueillies auprès des communautés, pour voir la meilleure réponse à la question d'insécurité dans l'Est du pays.
"Nous allons avoir le temps de faire un bilan, de revenir avec un rapport précis de sorte que l'on puisse orienter sur base des recommandations qui nous ont été données. D'autres estiment effectivement qu'il fallait mettre fin à l'état de siège, tandis qu'une autre tendance est de dire que nous devons peut-être nous réorganiser du point de vue opérationnel tout en gardant l'état de siège, et donc toutes ces évaluations doivent être mises sur la table pour nous permettre de prendre la bonne orientation en faveur des populations du Nord-Kivu", avait-il dit.
Pour rappel, le président Tshisekedi avait proclamé l'état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri en mai 2021, dans le but de mettre fin aux violences perpétrées par de multiples groupes armés. Les institutions provinciales sont depuis dirigées par les militaires, mais les attaques contre les civils persistent.